Introduction

Les émissions de gaz à effet de serre ont conduit depuis le début de l'ère industrielle à une augmentation globale des températures atmosphériques. Ce changement climatique d'origine anthropique contribue à modifier les régimes de perturbations naturelles, qu'elles soient biotiques ou abiotiques (Seidl et al., 2017 ; Senf & Seidl, 2021). Par exemple, une augmentation de la fréquence, de l'intensité et de l'étendue spatiale des épisodes de sécheresse est attendue en Europe (Allen et al., 2010 ; Moravec et al., 2021 ; Samaniego et al., 2018 ; Senf & Seidl, 2021). Depuis une trentaine d'années, les changements liés aux régimes de sécheresse en Europe ont eu pour conséquence une augmentation de la mortalité des arbres et par extension des peuplements forestiers (Senf et al., 2020 ; Taccoen et al., 2019). Ces changements de régimes de perturbations peuvent aboutir à des phénomènes de dépérissement complexes. La succession dans le temps de facteurs prédisposant (par exemple, sol sableux drainant), déclenchant (par exemple, sécheresse) et aggravant (par exemple, épidémie d'insectes à potentiel ravageur ; Landmann, 1994 ; Manion, 1981 ; Nageleisen et al., 2010) peut conduire à la mort progressive des arbres, parfois sur de larges surfaces. Ces changements peuvent aussi aboutir à des processus de mortalité très rapides, à la suite, par exemple, de pullulations d'insectes opportunistes. Dans ce contexte, la gestion des peuplements en crise va devenir de plus en plus fréquente (Brunier et al., 2020).

Les perturbations naturelles sont des moteurs majeurs de la dynamique des écosystèmes forestiers, particulièrement en l'absence de gestion (Bengtsson et al., 2003 ; Kuuluvainen, 2016 ; Pickett & White, 1985). Tempêtes, incendies, sécheresses, pullulations de bioagresseurs modulent fortement et durablement la structure et le fonctionnement des forêts (Pickett & White, 1985 ; Van Lierop et al., 2015). Ces perturbations détruisent des ressources et des habitats. Par la transformation des éléments et des structures présents au sein de l'écosystème avant perturbation (Franklin et al., 2000 ; Swanson et al., 2011 ; Thorn et al., 2018), elles conduisent aussi à en créer de nouveaux qui hébergent des assemblages riches en espèces à haute valeur de conservation. Ainsi, les banques de graines deviennent régénération forestière et les arbres vivants deviennent bois mort (Swanson et al., 2011). Ces ressources et ces microhabitats générés par les perturbations sont nommés héritages de perturbation (« disturbance legacies » en anglais) et ont une grande importance dans les processus de résilience des forêts (Franklin et al., 2000 ; Johnstone et al., 2016 ; Swanson et al., 2011). Toutefois, les perturbations naturelles peuvent s'opposer aux objectifs de production de bois en tuant des arbres, en causant des baisses d'accroissement (par exemple, les sécheresses ; Anderegg et al., 2015) et en dépréciant la valeur marchande des arbres (Schmiegelow et al., 2006).

Les questions de la gestion des peuplements forestiers en crise et de la préparation aux changements actuels et futurs sont fondamentales (Brunier et al., 2020 ; Legay & Mortier, 2006). Aujourd'hui, les méthodes de gestion généralement mises en œuvre en réponse à un dépérissement impliquent la coupe sanitaire. Elle est définie par l'exploitation en urgence des arbres dépérissants ou morts, pendant un phénomène de dépérissement, et hors du cadre du plan de gestion normale des peuplements forestiers (Brunier et al., 2020 ; Lindenmayer & Noss, 2006). Elle poursuit principalement deux objectifs :

— la récupération d’une part significative de la valeur économique des produits accidentels (« salvage logging ») ;

— la prévention, le ralentissement, voire l'arrêt de pullulations d'insectes ravageurs et de la dispersion d'agents pathogènes, ou encore la prévention de futurs incendies (« sanitation logging ») (Leverkus et al., 2021a ; Müller et al., 2021 ; Thorn et al., 2018).

Il s'est constitué ces dernières années une base relativement riche d'études questionnant les effets de ces coupes sanitaires sur le fonctionnement des écosystèmes forestiers et des services écosystémiques rendus (encadré 1 ; Leverkus et al., 2020 ; Lindenmayer et al., 2008 ; Thorn et al., 2018). À travers cette revue de littérature, nous restituons ici les principaux résultats et consensus issus de ces différentes études, afin d'améliorer les pratiques aujourd'hui mises en œuvre dans les peuplements gérés dépérissants. Nous comparons la réponse des écosystèmes forestiers affectés par une perturbation selon qu'il y ait eu ou non une coupe sanitaire à la suite (c'est-à-dire comparaison intervention vs. non-intervention ; figure 1).

Pour cela, nous nous sommes concentrés sur la réponse de différents facteurs de fonctionnement de l'écosystème forestier. Nous avons sélectionné des services écosystémiques associés à la résilience de l'écosystème forestier. Nous adoptons ici la définition « écologique » de la résilience, c'est-à-dire nous ne ciblons pas un stade particulier d'évolution de l'écosystème forestier mais plutôt une trajectoire particulière centrée autour d'un bassin d'attraction, un état écologique particulier (figure 1). La résilience est alors définie comme « la mesure de la persistance du système étudié et sa capacité à absorber les changements et perturbations et toujours maintenir les mêmes relations entre populations et variables d'états » (figure 1 ; Holling, 1973 ; Nikinmaa et al., 2020). Cette capacité d'absorption est tout d'abord assurée par des facteurs biotiques : nous avons sélectionné la biodiversité pour sa participation majeure dans la réorganisation de l'écosystème suite à une perturbation (Bengtsson et al., 2003) ; ainsi que la capacité de maintien d'une couverture de végétation ligneuse, assurant le maintien du couvert forestier à plus long terme. En outre, nous avons sélectionné différents facteurs abiotiques :

— la résistance à de futures perturbations assurant le maintien de l’état écologique (figure 1),

— les caractéristiques physicochimiques du sol, car elles participent au fonctionnement de l'écosystème et à sa productivité (Ay et al., 2020),

— la quantité de bois mort, souvent utilisée comme mesure de la « naturalité » des écosystèmes forestiers (Kunttu et al., 2015).

En complément, Thorn et al. (2018) indiquent que les espèces de milieux forestiers ouverts sont plutôt favorisées par les coupes sanitaires, aux dépens des espèces de milieux forestiers fermés. Nous avons souhaité vérifier ce résultat en associant certaines guildes écologiques aux milieux forestiers fermés et ouverts selon les préférences connues dans la littérature ou selon la préférence annoncée dans les articles. Nous faisons l'hypothèse que la coupe sanitaire agit comme perturbation supplémentaire conduisant à une réduction de résilience en augmentant les probabilités de changement d'un état écologique à un autre (aussi appelé changement de trajectoire écologique ; figure 1).

Figure 1 Résumé de l'objectif de notre revue de la littérature
À la suite d'une perturbation naturelle, nous étudions les comparaisons de réponses écologiques faites dans la littérature entre la modalité sans gestion et celle avec coupe sanitaire. Dans l'encadré grisé, nous définissons la résilience écologique d'après Nikinmaa et al. (2020) comme « la mesure de la persistance du système étudié et sa capacité à absorber les changements et perturbations et toujours maintenir les mêmes relations entre populations et variables d'états ». À l'extrême donc, une forte perte de résilience peut mener au franchissement d'un seuil d'irréversibilité et à un changement d'état écologique, aussi appelé dysclimax (passage du stade I à II dans le schéma).

Encadré 1

Le parc national de la forêt de Bavière en Allemagne (Nationalpark Bayerischer Wald), à la frontière avec la République Tchèque et l'Autriche, est connu pour l'étude des dépérissements et des coupes sanitaires (Thorn et al., 2017). Suite aux perturbations causées par différentes tempêtes depuis les années 1980, plusieurs larges épidémies de scolyte typographe (Ips typographus L.) se sont déclarées dans les peuplements dominés par l'Épicéa commun (Picea abies (L.) H. Karst). Dans la zone cœur du parc, une stratégie de laisser-faire a été adoptée tandis que, dans les zones périphériques gérées, les peuplements infestés ont été exploités. Avec un recul de près de dix ans, il apparaît que les coupes sanitaires ont induit une baisse du nombre d'espèces de champignons lignicoles et de coléoptères saproxyliques1 et du nombre d'espèces de mousses et lichens épiphytes2 suite à la réduction de la quantité de bois mort et à la modification drastique du microclimat (Bässler & Müller, 2010 ; Cours et al., 2021 ; Müller et al., 2010 ; Thorn et al., 2016a ; Thorn et al., 2014 ; Thorn et al., 2015 ; Thorn et al., 2017).

À gauche : Paysage forestier par suite d’une pullulation du coléoptère Ips typographus (L.) dans la zone cœur du parc de Bavière ; à droite : zone de régénération forestière naturelle abondante à la suite du dépérissement des épicéas et sans coupe sanitaire.
Photos : © G. Parmain, projet CLIMTREE.

1. Saproxylique : terme décrivant toute espèce qui dépend, pendant une partie de son cycle de vie, du bois mort en décomposition provenant d'arbres vivants, affaiblis ou morts ou d'espèces dépendant directement de ses ressources et habitats (par exemple prédateurs, parasitoïdes, etc.) (Bouget et al., 2019 ; Stokland et al., 2012).

2. Épiphyte : terme décrivant toute plante, vasculaire ou non, ou lichen qui croît sur un autre végétal. Le bois mort est un support important pour de nombreuses espèces de mousses en forêts tempérées (Gosselin et al., 2017).

Matériels et méthodes

Nous définissons comme coupe sanitaire, l'exploitation des arbres vivants dépérissants ainsi que celle des arbres récemment morts dans des objectifs de récupération économique, de ralentissement du phénomène de dépérissement, et de prévention des risques liés aux bioagresseurs et incendies. La comparaison des réponses des facteurs étudiés porte sur des forêts perturbées avec ou sans coupe sanitaire (figure 1). Nous avons sélectionné les différents services écosystémiques à partir d'une précédente méta-analyse et ciblé ceux associés à la résilience (tableau 1 ; Leverkus et al., 2020 ; Scheffer, 2009). Nous avons ajouté le service de provision de biodiversité (non étudié par Leverkus et al., 2020) puisqu'elle a une importance avérée dans la résilience des écosystèmes, en participant directement à leur réorganisation suite à une perturbation et à leur fonctionnement (Bengtsson et al., 2003 ; Brockerhoff et al., 2017 ; Schulze & Mooney, 2012). La biodiversité a été étudiée par les changements de richesse spécifique (c'est-à-dire le nombre d'espèces) et/ou de composition des assemblages d'espèces. De plus, nous avons étudié la résilience du peuplement forestier à travers la reconstitution du couvert forestier (c'est-à-dire le recouvrement, l'abondance et/ou la biomasse de semis ou de fourrés ; tableau 1). Nous avons jugé que le fort couvert de régénération forestière après une perturbation, sans tenir compte de sa composition dendrologique, permet un retour rapide à la structure et au fonctionnement pré-perturbation. Nous avons relevé les effets des coupes sanitaires sur le stock de bois mort, l'un des principaux héritages biologiques après un dépérissement et participant à la résilience de l'écosystème par le maintien des communautés forestières colonisant ce support (Bengtsson et al., 2003 ; Cours et al., 2021 ; Franklin et al., 2000 ; Swanson et al., 2011 ; Thorn et al., 2017). De plus, le bois mort est un facteur-clé de la naturalité de l'écosystème forestier (Kunttu et al., 2015). Par ailleurs, les perturbations interagissent dans le temps : une tempête peut faciliter la survenue d'une pullulation de ravageurs, une sécheresse la survenue d'un incendie de forêt (Seidl et al., 2017). Par conséquent, nous avons noté les effets potentiels des coupes sanitaires sur la survenue de perturbations ultérieures (c'est-à-dire neutre vs facilitation ou inhibition). Enfin, de nombreux processus liés au sol sont importants pour un retour plus rapide à une structure et un fonctionnement de l'écosystème proche de l'état pré-perturbation : banque de graines, tassement ou cycle des nutriments (Albrich et al., 2020 ; Ay et al., 2020). Nous avons donc relevé les effets des coupes sanitaires sur divers caractères de régulation des caractéristiques physicochimiques du sol (tableau 1 ; Pereg et al., 2018).

Tableau 1 Sommaire des différents services écosystémiques étudiés dans le cadre de cette revue de la littérature selon le type de perturbation naturelle et le nombre de références associées (une même référence peut décrire la réponse de plusieurs services écosystémiques).
Liste venant en partie des services étudiés par Leverkus et al. (2020)


Groupe de services écosystémiques

Service écosystémique

Perturbation

Nombre de références

Biodiversité

Provision de biodiversité

Incendie

47

Tempête

18

Insecte

21

Maintien du cycle de vie, habitat et protection du patrimoine génétique

Régénération ligneuse

Incendie

33

Tempête

20

Insecte

8

Quantité de bois mort

Incendie

8

Tempête

9

Insecte

8

Régulation des événements extrêmes

Résistance à la perturbation suivante

Incendie

8

Tempête

6

Insecte

6

Régulation

des caractéristiques

physicochimiques du sol

Tassement

Incendie

4

Stock de carbone

Incendie

3

Insecte

1

Quantité de nutriments

Incendie

7

Insectes

3

Capacité d’échange cationique

Incendie

2

Par la suite, nous avons effectué en mars 2021 une recherche dans le Web of science (WOS) en utilisant le terme de recherche « “salvage logging” OR “sanitation logging” OR “sanitary logging" OR "sanitation cutting" », qui a livré 527 articles scientifiques. Nous avons sélectionné les articles traitant des services écosystémiques identifiés (tableau 1) ainsi que ceux mettant en œuvre une comparaison claire entre peuplements perturbés non-exploités et peuplements perturbés exploités par coupe sanitaire (figure 1 ; Leverkus et al., 2018). Pour chacune de ces références, nous avons noté la dernière perturbation ayant affecté l'écosystème forestier traité. Finalement, nous avons étudié l'effet des coupes sanitaires à partir de 194 études publiées de 1996 à 2021 (figure 2 ; annexe1) et procédé à un comptage de votes, en notant pour chaque étude le sens des effets significatifs de la coupe sanitaire en comparaison des zones perturbées par le même facteur mais non-exploitées (figure 1). Pour tout effet significativement positif sur le service étudié un score de 1 a été attribué, pour tout effet significativement négatif, un score de – 1, et un score de 0 a été attribué pour toute absence d'effet significatif. Ainsi, nous avons pu mesurer l'effet moyen des coupes sanitaires sur la biodiversité et sur les différents services écosystémiques identifiés, avec le log-ratio des fréquences d'effets positifs par la fréquence d'effets négatifs (équation 1). La principale limite de notre travail et celle associée plus généralement à la méthode de la revue de la littérature, font que nous ne pouvons pas pondérer notre analyse par l'incertitude et la magnitude des effets des coupes sanitaires associés à chacune des études.

Équation 1      Effet moyen des coupes sanitaires=logfréquence d'effets positifs + 1fréquence d'effets négatifs + 1

Concernant la biodiversité, nous avons recensé les résultats selon les groupes taxonomiques et les guildes écologiques étudiés dans les différents articles. Par exemple, pour les oiseaux, nous avons noté les effets des coupes sanitaires sur l’ensemble du groupe et sur différentes guildes spécifiques (par exemple les oiseaux de milieux forestiers fermés ou ouverts) à partir des résultats directement fournis par les articles étudiés (tableau 2).

Tableau 2 Liste des groupes taxonomiques dont les réponses ont été étudiées dans le cadre de la revue systématique de la littérature, l’habitat associé à dire d’expert (forestier ouvert ou fermé), selon la perturbation et le nombre de références associées (une même référence peut décrire la réponse de plusieurs groupes ou guildes)


Groupe taxonomique ou guilde écologique

Habitat associé

Perturbation

Nombre de référence

Arthropodes

Incendie

8

Tempête

3

Insecte

4

Coléoptères Carabidae

3

Coléoptères saproxyliques

Forestier ouvert

7

Lépidoptères (Rhopalocères)

Forestier ouvert

1

Pollinisateurs

Forestier ouvert

3

Autres

3

Champignons

Tempête

2

Insecte

3

Saproxyliques

3

Autres

2

Oiseaux

Incendie

22

Tempête

1

Insecte

8

Cavicoles

8

Nicheurs en buisson

Forestier ouvert

2

Nicheurs en canopée

Forestier fermé

2

Nicheurs au sol

Forestier ouvert

2

Spécialistes des milieux fermés

Forestier fermé

4

Spécialistes des milieux ouverts

Forestier ouvert

4

Autres

9

Lichens

Incendie

1

Insecte

1

Epixyliques (sur l’écorce)

2

Mammifères

Incendie

3

Insecte

5

Chauves-souris

2

Rongeurs

2

Autres

5

Plantes

Incendie

15

Tempête

12

Insecte

6

Bryophytes (mousses)

7

Vasculaires

9

Début de succession

Forestier ouvert

3

Fin de succession

Forestier fermé

7

Autres

13

Par la suite, nous n’avons conservé pour l’analyse que les groupes taxonomiques de niveau inférieur ou supérieur dans la typologie, pour lesquels nous avons jugé avoir un nombre assez élevé d’études (au moins quatre) pour apporter des résultats à discuter.

Nous avons pris en compte le délai entre la coupe et l’étude à partir des informations présentes dans les matériels et méthodes, pour les effets sur la régénération ligneuse. Nous avons aussi relevé le niveau d’intensité des coupes sanitaires comme variable quantitative continue, c’est-à-dire la quantité de bois mort ou dépérissant prélevée en proportion du stock initial, lorsque l’information était disponible et nous avons étudié son effet sur les réponses de la biodiversité. Par conséquent, nous n’avons pas utilisé les données brutes, pour les réanalyser dans le cadre d’une méta-analyse, mais seulement les résultats présentés dans le corps des articles.

Afin de tester à nouveau l'hypothèse d'un effet positif des coupes sanitaires sur les espèces de milieux forestiers ouverts aux dépens des espèces de milieux forestiers fermés formulée par Thorn et al. (2018), nous avons inféré une préférence d'habitat pour certains groupes taxonomiques à partir des connaissances disponibles dans la littérature ou des informations fournies dans les articles (tableau 2). Il est par exemple connu que la diversité du groupe des coléoptères saproxyliques répond favorablement à l'ouverture de la canopée (tableau 2 ; Bouget et al., 2014 ; Seibold et al., 2016). De même, concernant la régénération forestière, nous avons caractérisé certains traits fonctionnels réagissant aux coupes sanitaires d'après la littérature. Nous avons ainsi renseigné, dans la limite des connaissances disponibles, la tolérance à l'ombrage en trois catégories, c'est-à-dire intolérance [par exemple Pin d'Alep (Pinus halepensis Mill.)], tolérance intermédiaire [par exemple Épicéa commun (Picea abies Karst.)], tolérance forte [par exemple Épinette noire [Picea mariana Mill.)], et la capacité à rejeter de souche à l'aide de différentes sources (Burns & Honkala, 1990a ; Burns & Honkala, 1990b ; Martin & Gower, 1996 ; Rameau et al., 1989).

Résultats

Notre synthèse de la littérature montre que les effets des coupes sanitaires sur les communautés forestières ont été principalement étudiés sur les plantes, les oiseaux ainsi que les arthropodes, majoritairement des insectes (tableau 2). Par ailleurs, les effets des coupes sanitaires après incendie (111 études), tempête (42 études) ou épidémie de ravageur (41 études) sont plus largement étudiés que pour d’autres facteurs de perturbation (par exemple les sécheresses, les vagues de chaleurs, les agents pathogènes, etc. ; figure 2). Parmi les trois perturbations principales, nous constatons qu’une part importante des études se concentrent sur les réponses post-incendies (c’est-à-dire 57 %). Enfin, les études sont majoritairement concentrées en Amérique du Nord et en Europe, au sein des biomes de forêt de montagne (72 études), forêt tempérée (65 études), forêt boréale (26 études) et forêt méditerranéenne (30 études ; figure 2). Par ailleurs, certaines perturbations sont associées à des zones géographiques spécifiques, c’est-à-dire feux de forêt au sein des forêts méditerranéennes et boréales, et côte ouest de l’Amérique du Nord ; tempêtes en Europe centrale, sur la façade Est et la région des Grands Lacs de l’Amérique du Nord et les côtes japonaises (figure 2).

Figure 2. Localisation des études recensées dans le cadre de ce travail
Les études concernant les coupes sanitaires étudient majoritairement les effets consécutifs aux incendies de forêt (en rouge), tempêtes (en bleu) et pullulations d’insectes à potentiel ravageur (jaune).

Effets sur la biodiversité

En moyenne, l’abondance et la richesse spécifique des arthropodes (15 études), des oiseaux (31 études) et des plantes (33 études) répondent négativement aux coupes sanitaires (figure 3A). De même, l’abondance des mammifères (8 études) est négativement affectée par les coupes sanitaires (pas d’études concernant la richesse spécifique ; figure 3A). Parmi les arthropodes, les coléoptères saproxyliques répondent négativement aux coupes sanitaires (figure 3B). Les oiseaux cavicoles (c’est-à-dire nichant dans les cavités d’arbres) sont également négativement affectés par les coupes sanitaires, de même que les espèces spécialistes des milieux forestiers fermés (4 études ; figure 3B). Au contraire, les oiseaux considérés comme spécialistes des milieux forestiers ouverts répondent positivement aux coupes sanitaires (4 études ; figure 3B). Les bryophytes sont négativement affectées par les coupes sanitaires, tandis que les plantes vasculaires ont des réponses relativement neutres aux coupes sanitaires, potentiellement positives en abondance (figure 3B).

L’intensité de la coupe sanitaire en proportion de prélèvement a peu d’effet sur les réponses de la biodiversité (figure 4). À des niveaux d’intensité de prélèvement inférieurs à 50 %, les réponses de la biodiversité restent encore relativement négatives (figure 4). Toutefois, il existe peu de travaux étudiant des niveaux de récolte intermédiaire (c’est-à-dire à moins de 75 % ; figure 4).

Enfin, les groupes taxonomiques associés aux milieux forestiers fermés répondent négativement aux coupes sanitaires (figure 5). En revanche, les groupes taxonomiques associés aux milieux forestiers ouverts semblent favorisés par les coupes sanitaires, surtout en termes d’abondance (figure 5).

Figure 3 Effets des coupes sanitaires (A) sur les groupes taxonomiques étudiés et (B) sur des guildes spécifiques de biodiversité (en abondance et en richesse spécifique)
« n » correspond au nombre d’études concernant chaque groupe et chaque métrique.

Figure 4 Réponses de la biodiversité en abondance et en richesse spécifique selon l’intensité des coupes sanitaires
On remarque que la plupart des études montrent une intensité des coupes sanitaires de 75 % ou plus du stock global de bois (histogrammes du bas). En proportion, les effets négatifs restent importants même à de faibles intensités (par exemple < 50 %). Cependant, le faible nombre d’études à ces faibles niveaux de récolte limite les capacités d’interprétation de ces résultats.

Figure 5. Effet moyen des coupes sanitaires sur l’abondance et la richesse spécifiques des espèces liées aux habitats forestiers fermés (vert) et ouverts (orange)
« n » correspond au nombre d’études concernant chaque groupe et chaque métrique.

Effets sur les services écosystémiques

Les coupes sanitaires ont pour conséquence directe une forte réduction de la quantité de bois mort (figure 6). Par ailleurs, elles ne semblent pas grandement affecter les perturbations naturelles ultérieures : elles diminuent le risque de pullulations postérieures de ravageurs mais ne semblent pas avoir d’effets importants sur le risque global d’incendie (figure 6). En outre, nous remarquons des effets négatifs des coupes sanitaires sur le succès global de la régénération forestière (figure 6). Néanmoins, ce résultat est contrasté selon le groupe d’essences considéré, la capacité des essences à rejeter de souche ou encore leur degré de tolérance au couvert (figure 7). Ainsi, l’effet négatif des coupes sanitaires sur la régénération est surtout effectif pour les essences ne se régénérant que par graines, c’est-à-dire principalement des conifères (figure 7). Au contraire, les essences pouvant rejeter de souche, principalement les essences feuillues, ne sont pas affectées par les coupes sanitaires (figure 7). Il faut toutefois noter que les travaux concernant les réponses de la régénération forestière se concentrent principalement sur le court terme après la coupe (56 % des études réalisées moins de 5 ans après). Enfin, la littérature met en avant des conséquences généralement négatives des coupes sanitaires sur les caractéristiques physicochimiques du sol (figure 6). En effet, les coupes sanitaires se traduisent par un moindre stock de carbone dans le sol (4 études), une moindre capacité d’échange cationique (2 études), une forte perte de porosité (4 études) et surtout, une plus faible quantité de nutriments (10 études ; figure 6).

Figure 6. Effets des coupes sanitaires sur les services écosystémiques
B.M. = bois mort ; Perturb. suiv. = perturbation suivante ; Rég. For. = régénération forestière ; CEC = capacité d’échange cationique. « n » correspond au nombre d’études concernant chaque métrique.

Discussion

Contextes d’étude des conséquences écologiques des coupes sanitaires

Les études des conséquences écologiques des coupes sanitaires se concentrent autour de trois types de perturbations : les incendies (58 %), les tempêtes (22 %) et les pullulations d'insectes ravageurs (21 %). Les articles concernant les conséquences post-incendie sont très majoritaires et limitent par conséquent la généralisation de nos résultats (tableaux 1 et 2). Par ailleurs, nous n'avons pas trouvé mention d'études des coupes sanitaires suite à d'autres facteurs de perturbation émergents tels que les sécheresses (hormis nos travaux pyrénéens ; Cours et al., 2021 ; Cours et al., 2022) ou les agents pathogènes. Il est probable que les sécheresses ou les pics de chaleur soient des facteurs déclenchants ou prédisposants des dépérissements en association au facteur identifié (par exemple sécheresse avant épidémie d'insectes ravageurs ou incendie de forêt ; Rouault et al., 2006 ; Sallé et al., 2014 ; Seidl et al., 2017). Avec le changement climatique, les dépérissements liés aux sécheresses et pics de chaleur sont des phénomènes en émergence (Senf et al., 2020 ; Senf & Seidl, 2021 ; Taccoen et al., 2019). De même, les dépérissements dus à des agents pathogènes sont souvent associés à l'introduction de pathogènes exotiques et sont eux aussi un phénomène émergent, mais ayant déjà des conséquences massives sur le fonctionnement des écosystèmes forestiers (par exemple l'encre du châtaignier [Phytophthora cinnamomi Rands et P. cambivora (Petri) Buisman] ou la chalarose du frêne [Hymenoscyphus fraxineus (Kowalski) Baral et al.]). Toutefois, les travaux concernant les agents de perturbations biotiques utilisés ici se concentraient principalement sur des agents indigènes, excepté pour le puceron lanigère de la pruche (Adelges tsugae (Annand)) faisant l'objet d'une littérature relativement importante en Amérique du Nord.

Des effets généralement négatifs sur la biodiversité mais différents selon l’habitat de prédilection de la guilde écologique

La synthèse des études montre des réponses généralement négatives aux coupes sanitaires de la part des différents groupes taxonomiques étudiés (figure 3A). C'est à pondérer par le fait que ces études concernent majoritairement des coupes suivant des incendies (55 % ; tableau 1). Notre observation rejoint les résultats d'une méta-analyse récente réalisée par Thorn et al. (2018). Les coupes sanitaires visent à extraire des arbres dépérissants et morts. Elles affectent par conséquent la quantité de ressources saproxyliques et l'hétérogénéité interne des peuplements, et participent à l'ouverture du milieu (Cours et al., 2021 ; Thorn et al., 2017). Le bois mort constitue un des principaux héritages de perturbation présents suite à une perturbation naturelle et contribuant à la résilience du milieu forestier (Cours et al., 2021 ; Swanson et al., 2011 ; Thorn et al., 2018 ; Waldron et al., 2013). Les arbres morts ou dépérissants générés par la perturbation fournissent microhabitats et ressources trophiques pour les espèces saproxyliques (encadré 1), notamment cavicoles : la création de loges y est facilitée et le bois est colonisé par une grande abondance d'arthropodes facilitant l'alimentation des insectivores (Drever et al., 2009 ; Murphy & Lehnhausen, 1998 ; Ojeda et al., 2007). De plus, un écosystème forestier perturbé et non exploité présente une grande hétérogénéité structurale verticale et horizontale qui favorise la présence d'un grand nombre d'espèces et d'une grande abondance d'individus (figure 3 ; Thorn et al., 2017).

En accord avec les résultats de Thorn et al. (2018), la réponse des groupes taxonomiques est différente selon l'habitat préférentiellement recherché (figure 3B et figure 5). Les groupes préférant les habitats forestiers fermés répondent négativement aux coupes sanitaires (figure 5). C'est le cas notamment chez les oiseaux (figure 3A ; voir par exemple Castro et al., 2010) : les coupes sanitaires ont tendance à réduire l'abondance et la richesse spécifique des oiseaux cavicoles autant primaires (par exemple les pics) que secondaires (par exemple les mésanges ou les sittelles ; Hutto & Gallo, 2006 ; Morissette et al., 2011). Ce groupe des oiseaux cavicoles concentre environ 40 % de l'avifaune forestière en France et de fait, est très important, autant numériquement que fonctionnellement dans les écosystèmes forestiers (Blondel, 2005). Au contraire, les groupes préférant les milieux forestiers ouverts répondent généralement positivement aux coupes sanitaires, exception faite du groupe des coléoptères saproxyliques lié à des habitats principalement forestiers, pénalisés par les prélèvements de substrats (figure 3B et figure 5). Par exemple, en Espagne, Rost et al. (2012) montrent que des espèces d'oiseaux associées à des milieux plus ouverts, telles que le moineau domestique (Passer domesticus L.) ou encore l'alouette lulu (Lullula arborea L.), sont favorisées par l'extraction des chandelles post-incendie. D'ailleurs, dans les régions où les oiseaux liés à des milieux ouverts extra-forestiers sont en danger et voient leur population décliner au cours du temps (par exemple le Suivi temporel des oiseaux communs (STOC) ; Fontaine et al., 2020), Rost et al. (2012) identifient les zones de coupes sanitaires comme de potentielles zones refuges (cf. aussi Wermelinger et al., 2017). Cela traduit du profond changement écologique qu'induisent les coupes sanitaires. Dans le parc national de la forêt de Bavière (encadré 1), Thorn et al. (2016) montrent que les zones perturbées par une tempête puis suivies d'une coupe sanitaire, sont caractérisées par la présence de deux espèces de pipit : le pipit des arbres (Anthus trivialis L.) et le pipit spioncelle (Anthus spinoletta L.), deux espèces connues pour se nourrir au sein de milieux plutôt ouverts et extra-forestiers.

Par conséquent, il résulte généralement des coupes sanitaires une altération des communautés forestières pouvant affecter la résilience de l'écosystème. Les coupes sanitaires induisent un changement des communautés dont la composition s'éloigne des assemblages forestiers préexistant au dépérissement, par un effet additif au dépérissement (Castro et al., 2010 ; Cours et al., 2021 ; Lindenmayer et al., 2018 ; Michalová et al., 2017 ; Morissette et al., 2002).

Bien que la plupart des travaux se concentrent sur les réponses à court terme de la biodiversité (Thorn et al., 2018), cette altération des communautés peut perdurer longtemps après la coupe sanitaire. Par exemple, 20 ans après les coupes sanitaires ayant suivi une épidémie de tordeuse du bourgeon (Choristoneura fumiferana (Clemens)) dans des peuplements de Sapin baumier (Abies balsamea (L.) Mill.) au Canada, le changement dans l'assemblage des coléoptères saproxyliques était encore perceptible (Norvez et al., 2013). Cependant, les effets à long terme sur la biodiversité restent à approfondir, tant on manque d'études sur la dynamique des communautés à long cours, c'est-à-dire plus de 5 ans après perturbation/exploitation (Thorn et al., 2018).

Les coupes sanitaires peuvent s'apparenter pour l'écosystème forestier à une perturbation s'additionnant en sévérité à la perturbation initiale et ramenant alors l'écosystème vers des stades plus précoces d'évolution, pouvant à l'extrême amener l'écosystème à franchir un seuil d'irréversibilité et résulter en une perte de résilience (figure 1 ; Castro et al., 2010 ; Cours et al., 2021 ; Leverkus et al., 2014 ; Michalová et al., 2017 ; Morissette et al., 2002 ; Orczewska et al., 2019 ; Rumbaitis del Rio, 2006). Une originalité de notre revue de littérature est la prise en compte de l'intensité de la coupe sanitaire : il apparaît que les réponses de la biodiversité sont globalement négatives, même à des niveaux relativement faibles d'intensité de prélèvement (figure 4). La colonisation d'un habitat par une espèce ou sa disparition ne sont pas liées à la quantité de cet habitat par une fonction linéaire. Müller et Bütler (2010) ont montré que, pour le bois mort, la colonisation du substrat est associée à un effet seuil : il est nécessaire d'avoir une certaine quantité de bois mort pour voir se développer un grand nombre d'espèces saproxyliques (par exemple 30 à 50 m3/ha dans les forêts feuillues de plaine ; cf. aussi Bässler & Müller, 2010). Cependant, en dessous de ces valeurs seuils, la colonisation du substrat bois mort se fait par un faible nombre d'espèces, plutôt généralistes. Ainsi, même si la coupe sanitaire prélève une quantité relativement faible (par exemple 50 %) de bois mort et dépérissant, si la quantité restante est inférieure à la valeur du seuil, alors les organismes associés au bois mort ne pourront pas efficacement coloniser le substrat restant.

Les coupes sanitaires semblent affecter l'élasticité (c'est-à-dire mesure la reconstitution suite à un changement) des écosystèmes forestiers en contribuant à rallonger le temps de résilience (c'est-à-dire « perte d'élasticité ») lorsqu'on compare les communautés avec celles présentes à la suite des perturbations naturelles seules. Elles affectent négativement les espèces associées aux milieux forestiers fermés (c'est-à-dire de fin de succession), au profit des espèces de milieux forestiers plus ouverts (c'est-à-dire de début de succession ; figure 5), voire des espèces de milieux ouverts extra-forestiers. En comparaison, dans les milieux perturbés non exploités, l'hétérogénéité à échelle spatiale fine garantit une superposition dans l'espace et dans le temps d'espèces liées à des milieux fermés et non fermés (Hanson & Stuart, 2005 ; Larrieu et al., 2014 ; Rumbaitis del Rio, 2006). Les coupes sanitaires ramènent donc les écosystèmes vers des stades plus précoces de succession, pouvant entraver la résilience de l'écosystème forestier en imposant un temps de retour plus long à un état post-perturbation proche de l'état initial (Leverkus et al., 2014, Lindenmayer et al., 2008 ; Michalová et al., 2017).

Des sols généralement dégradés

En général, les coupes sanitaires dégradent les caractéristiques physicochimiques des sols (figure 6). Néanmoins, la majorité des travaux utilisés ici ont étudié les effets des coupes sanitaires sur les sols suite à un incendie (86 %), qui est une perturbation affectant fortement les propriétés des sols. Nos résultats sont donc en partie biaisés par le déséquilibre des publications disponibles. Cependant, suite à une coupe sanitaire, les sols apparaissent plus compacts (tassement suite au passage d'engins ; García-Orenes et al., 2017 ; Rab, 2004), ont une capacité d'échange cationique réduite et contiennent une moindre quantité de carbone et de nutriments que les sols de peuplements perturbés mais non exploités (figure 6 ; García-Orenes et al., 2017 ; Pereg et al., 2018). Concernant la compaction, celle-ci est généralement limitée par le maintien de cloisonnements d'exploitation (Ranger et al., 2020) représentant néanmoins une part non négligeable de la surface totale. Cette dégradation semble se maintenir dans le temps : après 10 à 11 ans, les sols des peuplements exploités après un incendie contiennent toujours significativement moins de carbone et d'azote et ont une capacité d'échange cationique réduite par rapport aux sols des peuplements incendiés et non exploités, traduisant une quantité moindre et une qualité altérée des matières organiques incorporées dans les sols (Kishchuk et al., 2015).

La réduction de la quantité de nutriments semble principalement être la conséquence de deux phénomènes. À court terme, il est observé une plus forte érosion des horizons de surface dans les peuplements perturbés et exploités, où ils sont particulièrement exposés, en comparaison de ceux non exploités (García-Orenes et al., 2017 ; Wagenbrenner et al., 2015). Cette érosion entraîne une perte d'éléments minéraux et de matière organique, servant à court terme de réservoir de nutriments comme l'azote et le phosphore. À long terme, le bois carbonisé contenant deux à neuf fois plus d'éléments minéraux que le sol alentour, leur récolte peut induire une réduction de la quantité de nutriments dans le sol (Kishchuk et al., 2015 ; Marañón-Jiménez et al., 2013).

Des effets globaux relativement négatifs sur la régénération naturelle mais essence-dépendants

Nous n'observons qu'un faible effet négatif des coupes sanitaires sur la régénération naturelle, au vu du ratio d'études montrant des réponses positives et négatives (figure 6). Cela pourrait résulter de la dégradation des caractéristiques physicochimiques des sols à la suite de la coupe sanitaire (voir § “Des sols généralement dégradés”). Une méta-analyse a montré que les coupes sanitaires n'ont pas d'effet significatif sur la régénération forestière (Leverkus et al., 2021b). Cependant, la réponse de la régénération forestière diffère selon les traits de vie des essences (Leverkus et al., 2021b). Ainsi, les espèces ayant la possibilité de se régénérer par la souche (c'est-à-dire presque uniquement les espèces feuillues) ne semblent pas défavorisées par les coupes sanitaires (Leverkus et al., 2014). Au contraire, les espèces ne se régénérant qu'à partir de graines sont négativement affectées (donc une majorité des espèces de conifères, mais aussi feuillues lorsqu'elles ne sont pas présentes dans le peuplement pré-perturbation ; figure 7). Cette réponse est potentiellement la résultante de deux processus. Premièrement, la soustraction des héritages de perturbation (c'est-à-dire exportation des bois morts, arasement des galettes de chablis) ainsi que le tassement du sol par le passage des engins de débardage, peuvent entraîner une baisse de la capacité de germination de la banque de graines présente dans le sol au moment de la perturbation naturelle. Par exemple, la banque de graines du sol d'Épicéa commun ou encore de Pin sylvestre (Pinus sylvestris L.) germe préférentiellement sur les substrats de bois mort ou à l'abri du bois mort présent au sol (Jonášová & Prach, 2004 ; Marzano et al., 2013 ; Svoboda et al., 2010). De même, les creux créés par les galettes de chablis suite aux tempêtes sont autant de milieux dans lesquels peuvent se développer les semis, surtout dans le cas d'humus de type Mor ou Dysmoder, caractérisés par des litières épaisses (Kuuluvainen & Kalmari, 2003). Deuxièmement, la coupe sanitaire peut aboutir à une baisse de la capacité du milieu à être colonisé par de nouvelles graines. Par exemple, suite à un incendie, le geai des chênes, espèce forestière qui joue un rôle crucial dans la dissémination des graines de chênes (Ducousso & Petit, 1994), continue d'occuper les zones de chandelles brûlées et à enfouir dans le sol des glands de Chêne [Quercus spp., dans l'étude, le Chêne vert (Q. ilex L.)], facilitant ainsi le retour plus rapide à l'écosystème pré-perturbation. Au contraire, il a tendance à éviter les zones exploitées par des coupes sanitaires, retardant par conséquent la colonisation naturelle des chênes (Castro et al., 2012). Quatre années après la coupe sanitaire, il en résulte près de trois fois plus de semis de Chêne dans les peuplements incendiés sans intervention (Castro et al., 2012 ; Leverkus & Castro, 2017).

En conséquence du prélèvement des arbres morts et dépérissants, l'une des modifications majeures des coupes sanitaires est l'ouverture de la canopée, affectant les conditions microclimatiques et modulant fortement les communautés végétales et animales (Cours et al., 2021 ; Thorn et al., 2017). Par conséquent, les coupes sanitaires semblent négativement affecter les espèces sciaphiles et de demi-ombre sans affecter les espèces héliophiles (figure 7). Par exemple, dans une forêt de l'État du Minnesota (États-Unis), Palik et Kastendick (2009) ont montré que 12 années après une tempête et une coupe sanitaire, la composition de la régénération était encore différente entre les parcelles perturbées avec ou sans coupe. Les surfaces non exploitées étaient caractérisées par une plus grande abondance d'essences sciaphiles (Palik & Kastendick, 2009). En Slovaquie, suite à une pullulation de scolytes au sein de peuplements d'Épicéa commun, Jonášová et Prach (2004) ont observé une augmentation de la densité d'espèces pionnières suite à la coupe sanitaire. Cependant, relativement peu de travaux étudient les effets des coupes sanitaires sur les espèces sciaphiles ou de demi-ombre, atténuant la robustesse de nos résultats (figure 7).

Figure 7. Effets moyens des coupes sanitaires sur différents compartiments de la régénération forestière
« n » correspond au nombre d’études concernant chaque métrique.

Par conséquent, bien que les coupes sanitaires semblent avoir des effets relativement faibles sur le succès global de la régénération forestière (figure 6), elles ont en réalité des répercussions sur sa composition et son évolution (figure 7). Les études montrent ainsi le remplacement d'espèces désavantagées par les coupes sanitaires (associées à certains héritages de perturbation), par des espèces au contraire avantagées, et a priori associées à des stades de succession plus précoces (Fidej et al., 2016 ; Hanson & Stuart, 2005 ; Jonášová & Prach, 2004 ; Leverkus et al., 2014 ; Orczewska et al., 2019 ; Palik & Kastendick, 2009 ; Taeroe et al., 2019). Par exemple, en Slovaquie, suite à une pullulation de scolytes dans des peuplements d'Épicéa commun, Michalová et al. (2017) montrent que les parcelles exploitées après perturbation, contiennent moins d'espèces ligneuses de fin de succession, au profit d'espèces herbacées pionnières. Ceci pourrait être mis à profit cependant dans le cas où l'essence se régénérant en masse par suite d'une perturbation n'est plus jugée adaptée au milieu dans le contexte d'augmentation des températures (par exemple anciennes plantations d'Épicéa commun en plaine). Il serait intéressant d'étudier dans quelles conditions techniques une coupe sanitaire pourrait permettre une meilleure colonisation du milieu par de nouvelles espèces pionnières tout en ne remettant pas en cause le maintien du microclimat forestier et sa biodiversité.

Cependant, ces résultats sont majoritairement issus d'études à court terme (56 % des études étudient l'effet des coupes sanitaires moins de cinq années après leur mise en œuvre). À plus long terme, les résultats semblent plus contrastés. Dans quatre cas d'étude, cette altération initiale de la composition de la régénération forestière perdure dans le temps, plus de 10 ans encore après la coupe sanitaire (Chen et al., 2014 ; Hanson & Stuart, 2005 ; Jonášová & Prach, 2004 ; Morimoto et al., 2019). Au Japon, dans un contexte post-tempête, Morimoto et al. (2019) montrent que ces modifications de composition sont encore observables 60 ans après la coupe sanitaire. Cependant, en parallèle, dans d'autres cas d'étude, les effets observés à court terme semblent s'être effacés au cours du temps entre les peuplements perturbés avec ou sans coupe sanitaire (Bāders et al., 2020 ; Kurulok & Macdonald, 2007 ; Lang et al., 2009 ; Leverkus et al., 2021b). De fait, les effets à moyen et long terme (c'est-à-dire supérieur à 10 ans) des coupes sanitaires sur la composition de la régénération, restent peu connus et doivent être mieux pris en compte dans de futures études. Par ailleurs, la plupart des études n'impliquent pas les pratiques associées aux coupes sanitaires. Pourtant, les choix de gestion appliqués après les coupes sanitaires ont d'importantes conséquences sur la résilience de l'écosystème. Par exemple, des plantations monospécifiques en plein, suite à des coupes rases sanitaires, diminuent la résilience de l'écosystème aux futures perturbations (Dhar et al., 2016 ; Thompson et al., 2007). De même, Moreira et al. (2013) ont montré que les coupes sanitaires suivies d'un labour du sol limitaient le rétablissement des espèces indigènes tout en favorisant l'établissement d'espèces exotiques envahissantes. Il apparaît donc capital d'étudier à l'avenir, non seulement l'effet des coupes sanitaires sur la régénération, mais aussi l'effet de la gestion appliquée aux jeunes peuplements.

Effets sur les perturbations suivantes : augmentation modérée du risque d’incendie et réduction des futures pullulations d’insectes

Nos résultats indiquent des risques modérés d'augmentation du risque d'incendie par les coupes sanitaires (figure 6). Les coupes sanitaires induisent en réalité deux effets antagonistes se neutralisant en partie au bilan global : une augmentation significative du risque à court terme par la densité accrue des petits combustibles au sol (par exemple branches, écorces, etc.) produits par les opérations de récolte suivie d'une réduction à plus long terme par la récolte des gros combustibles (par exemple troncs ; Collins et al., 2012 ; Donato et al., 2013 ; Griffin et al., 2013, Leverkus et al., 2021a ; Leverkus et al., 2020). Cependant, l'effet d'augmentation du risque incendie à court terme peut être limité en allongeant le délai entre la perturbation et la coupe sanitaire. Le maintien d'un délai de cinq années environ entre la perturbation naturelle et la coupe sanitaire assure une forte réduction du risque d'incendie (Leverkus et al., 2020). Néanmoins, dans une recherche de compromis, cette période d'attente est incompatible avec les objectifs économiques et sanitaires des coupes de récupération qui visent la récupération urgente des produits accidentels avant leur dépréciation ou avant la propagation d'insectes ravageurs et d'agents pathogènes (Leverkus et al., 2020). Par exemple, il est recommandé que les coupes sanitaires soient conduites dans les deux années suivant une tempête ou une sécheresse sévère pour réduire le risque de prolifération du typographe (Økland et al., 2016). Par ailleurs, le risque d'incendie à la suite d'une première perturbation naturelle et d'une coupe sanitaire, est aussi lié aux choix postérieurs de gestion. Thompson et al. (2007) ont ainsi montré que les parcelles replantées avec des essences de conifères après un premier incendie, brûlaient avec plus de sévérité 15 ans après, en comparaison des parcelles non replantées à la suite du premier incendie.

À l'inverse, les coupes sanitaires semblent réduire le risque de futures pullulations de ravageurs (figure 6). Une étude conduite sur neuf années sur l'ensemble du territoire helvète conclut à l'efficacité des coupes sanitaires pour réduire les infestations de typographe (Stadelmann et al., 2013). Néanmoins, ce résultat est encore appuyé par un faible nombre d'études (n = 4, figure 6 ; Leverkus et al., 2021a). Par conséquent, il apparaît urgent de mieux étudier les effets des coupes sanitaires sur la dynamique des populations de ravageurs forestiers opportunistes. En outre, des simulations montrent que les coupes doivent récolter et évacuer la totalité des arbres morts ou affaiblis en début d'épidémie de typographe : une évacuation inférieure à 95 % des arbres pourrait ne pas avoir d'effet sur la dynamique de population du typographe, qui ne requiert qu'une faible quantité de ressources pour passer d'un statut endémique à épidémique (Dobor et al., 2020a ; Dobor et al., 2020b ; Kausrud et al., 2012 ; Leverkus et al., 2021a). Cette récolte, en plus d'être difficile dans les faits (Dobor et al., 2020a), exclut tout compromis avec les objectifs de conservation des communautés du bois mort (Thorn et al., 2018 ; Thorn et al., 2020). En revanche, Thorn et al. (2016a) ont montré que l'écorçage partiel des chablis formés suite à une tempête puis abandonnés sur le sol permettrait de trouver un compromis entre le contrôle des populations de scolytes typographes et le respect des objectifs de conservation de la biodiversité saproxylique, mais pas vis-à-vis de l'objectif économique (Hagge et al., 2019).

Les limites et facteurs non étudiés de notre travail bibliographique

Les conclusions de notre travail ont certaines limites. La forte proportion d’études traitant des réponses post-incendie fragilise la généralisation de certaines de nos conclusions quant aux effets des coupes sanitaires postperturbation. Par ailleurs, la méthode de comptage de votes (« vote-counting ») utilisée ici nous empêche de pondérer notre analyse par l’incertitude et la magnitude des effets des coupes sanitaires associés à chaque étude. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons cherché à considérer les résultats issus des différentes méta-analyses existantes sur le sujet dans notre discussion. La méta-analyse est une méthode quantitative de synthèse des résultats, intégrant ces notions de magnitude et d’incertitude, fournissant donc des résultats plus robustes. Cependant, comptage de votes et synthèse narrative livrent une perspective globale sur un sujet sur lequel le faible nombre d’études disponibles rend la méta-analyse impossible ou fragile.

Nous avons cherché à analyser le bilan économique des coupes sanitaires, c'est-à-dire le bilan entre le bénéfice économique à exploiter les arbres morts et dépérissants et les coûts et pertes potentiellement engendrés. Ce bilan s'avère difficile à établir dans les faits, tant il peut varier selon l'échelle considérée, de la parcelle forestière à la filière régionale, voire nationale. Dans une étude, Eklund et al. (2009) montrent qu'après un incendie, l'exploitation de l'ensemble des chandelles n'est pas le meilleur choix économique en raison du coût engendré par l'exploitation des arbres éloignés des chemins de débardage. Ils invitent donc, dans une recherche de compromis avec le maintien d'habitat pour les oiseaux cavicoles, à maintenir toutes les chandelles dans les zones de la parcelle les plus éloignées des chemins de débardage (50 % de la surface totale ; Eklund et al., 2009). Après une tempête, Iranparast Bodaghi et al. (2018) montrent que, dans les forêts de montagne, les coupes sanitaires sont moins productives que l'exploitation traditionnelle, se traduisant par des coûts d'exploitation plus importants, et 10 à 30 % plus élevés que la recette de vente du bois. À plus large échelle spatiale et temporelle, les coupes sanitaires et l'arrivée massive de bois exploités peuvent causer de fortes instabilités des marchés régionaux (Zhai & Kuusela, 2020). Il apparaît que les considérations économiques sur la gestion des peuplements perturbés sont rares. Il serait nécessaire d'étudier le bilan économique de telles opérations sanitaires à différentes échelles : de la parcelle au marché régional, national, voire international. Néanmoins, l'absence de gestion induit l'abandon de l'ensemble des arbres du peuplement. Des scénarios intermédiaires de rétention doivent être étudiés avec, par exemple, le prélèvement des bois de plus grande valeur économique et la conservation du reste du peuplement forestier. Cependant, plus globalement, il apparaît que la réalisation d'un bilan économique complet est difficile à réaliser, tant les facteurs à prendre en compte sont nombreux. Un tel bilan devrait intégrer à la fois les coûts directs liés aux opérations sanitaires, les coûts indirects liés aux déstabilisations potentielles des marchés, mais aussi ceux liés aux altérations environnementales.

Par ailleurs, nous avons trouvé peu d'études discutant de l'aspect social, concernant les réactions vis-à-vis d'un milieu forestier perturbé ou l'acceptation des coupes sanitaires par les visiteurs et/ou les riverains. Kortmann et al. (2021) montrent que des peuplements d'épicéas communs infestés par des scolytes typographes au sein de zones protégées en Europe conservent un haut niveau récréatif auprès des visiteurs. Dans ce cas, des coupes sanitaires visant à rendre le milieu plus acceptable auprès du public seraient relativement inefficaces (Kortmann et al., 2021). Cependant, dans une étude canadienne, McFarlane et al. (2006) rapportent des réponses majoritairement hostiles d'habitants vivant à proximité de zones infestées par des scolytes (Dendroctonus ponderosae (Hopkins)). Ces résultats contrastés et le peu d'études disponibles appellent un approfondissement de ce champ de recherche.

De même, nous n'avons pas trouvé d'études concernant les coupes sanitaires associées à des facteurs émergents de dépérissement, comme les sécheresses et les vagues de chaleur, ou associées à des agents pathogènes et ravageurs exotiques alors qu'ils comptent pour une part significative des dépérissements actuels. Par exemple, en France, une proportion importante de la mortalité des arbres est causée par des agents pathogènes exotiques (par exemple l'encre du châtaignier ou la chalarose du frêne ; Drain & Derriere, 2021). Les effets environnementaux des coupes sanitaires réalisées pour éradiquer des foyers d'émergence sont à analyser (Budde et al., 2016 ; Foster & Orwig, 2006).

Conclusion : Nécessité d’une réflexion holistique pour la gestion des peuplements dépérissants

L’objectif de cette revue systématique de la littérature était de dresser le bilan de près de 30 années de publications scientifiques internationales sur les effets des coupes sanitaires. Nous avons cherché à exposer l’ensemble des conséquences, positives, neutres ou négatives, des coupes sanitaires sur différents éléments conditionnant la résilience des écosystèmes forestiers. Les coupes sanitaires semblent globalement induire une baisse de résilience dans les écosystèmes forestiers perturbés. Du point de vue de la biodiversité, les coupes sanitaires entraînent un recul des assemblages d’espèces vers les communautés des stades de succession plus précoces. Du point de vue de la régénération forestière, les coupes sanitaires n’induisent pas d’effet sur le succès global, mais semblent défavoriser les espèces de fin de succession. Il semble que ces conséquences des coupes sanitaires résultent de l’extraction des héritages de perturbation, tels que le bois mort. Les coupes sanitaires induisent aussi une plus forte ouverture du milieu forestier, une moindre fertilité et un tassement des sols. Par ailleurs, les coupes sanitaires augmentent le risque d’incendie ultérieur à court terme mais le réduisent à plus long terme. En revanche, leurs effets régulateurs sur les pullulations de ravageurs semblent globalement positifs. Enfin, les coupes sanitaires paraissent avoir des effets relativement délétères sur les caractéristiques physicochimiques des sols, en induisant une perte de porosité, et de moindres capacités trophiques. Cependant, ces résultats concernant les sols sont issus d’une majorité de résultats étudiant les conditions après incendie. De nouvelles études sont donc nécessaires pour étudier les conséquences des coupes sanitaires sur les sols après d’autres perturbations naturelles (par exemple bioagresseurs, sécheresse, tempête, etc.). Enfin, en liaison avec le manque d’études dédiées, il est aujourd’hui difficile de conclure quant aux coûts/bénéfices économiques et sociaux des coupes sanitaires. Dans le cadre actuel des connaissances, le compromis entre objectif économique (« salvage »), objectif sanitaire (« sanitary ») et objectif environnemental, semble difficile à trouver, tant les objectifs de maintien des héritages de perturbation d’une part, et de prélèvement des arbres dépérissants d’autre part sont éloignés les uns des autres.

Il est d’importance grandissante d’associer les différentes dimensions présentées ici dans l’étude et la gestion des peuplements dépérissants. Nous invitons donc à une réflexion sur la problématique de la gestion des peuplements en crise sanitaire et intégrant les enjeux sociaux, économiques et environnementaux. Par ailleurs, nous encourageons à pratiquer une gestion adaptative, telle que définie par Cordonnier et Gosselin (2009), c’est-à-dire une gestion « qui s’appuie sur l’apprentissage en adaptant les pratiques en fonction de ce qui a été appris ». Les outils de simulation s’avèrent et s’avèreront certainement encore plus cruciaux dans l’avenir pour mieux comprendre et prédire les conséquences du changement climatique sur les écosystèmes forestiers. Dans un but de connaissance, l’évolution des écosystèmes forestiers dépérissants, qu’ils soient exploités ou non, doit être étudiée en profondeur afin d’adapter la gestion et d’assurer leur meilleure résilience future. En attendant, la gestion actuelle peut déjà s’inspirer du corpus de connaissances disponibles dont nous avons cherché à faire la synthèse ici.

Notes