Chroniques

En résumé

Chapeau

Des thèses, des mémoires de fin d’études, des habilitations à diriger des recherches sont soutenus chaque année dans le domaine de la forêt et du bois. En faire connaître certains à nos lecteurs est l’objet de cette rubrique.

Interactions entre Chêne et cervidés durant le processus de renouvellement - cas des peuplements forestiers de plaine (Quercus robur et Q. petraea)

par Julien Barrère

Thèse soutenue publiquement le 7 septembre 2021 à INRAE (Champenoux)

Directrice de thèse : Sonia Saïd (OFB Birieux)

Directrice de thèse : Catherine Collet (INRAE Nancy)

Encadrant de thèse : Vincent Boulanger (ONF Fontainebleau)

Les cervidés ont vu leur abondance et leur distribution spatiale augmenter fortement depuis les dernières décennies, en France, et plus généralement à l’échelle de l’hémisphère Nord. Si ces espèces jouent un rôle clé dans le fonctionnement des écosystèmes forestiers, le niveau actuel des populations compromet le processus de régénération forestière de certaines essences cruciales pour la filière sylvicole telles que les Chênes sessile et pédonculé (Quercus robur et Quercus petraea). L’objectif de cette thèse est de quantifier et décrire les mécanismes sous-jacents de la contrainte exercée par les cervidés sur la régénération et d’identifier dans quelle mesure certaines opérations sylvicoles (coupe, dégagement et pose d’enclos) influencent cette contrainte. L’analyse de la composition de panses de cerf et de chevreuil sur le site de La Petite Pierre (Vosges) a permis de montrer que les glands de Chêne représentaient une ressource significative pour ces deux espèces, mais que leur consommation de gland saturait les années de forte fructification. Par des approches expérimentales, nous avons mis en évidence que l’abroutissement de la pousse apicale réduisait la croissance en hauteur des semis que ce soit en condition de terrain, ou en pépinière, et que ce phénomène s’expliquait notamment par une faible plasticité d’allocation des ressources pour compenser la perte de tissu chez les semis les plus jeunes. Cette plasticité augmentait avec l’âge des semis et l’intensité de l’abroutissement, et allait dans le sens d’un investissement dans la croissance rapide au détriment de la défense suite à un épisode d’herbivorie. En s’appuyant sur un réseau d’enclos-exclos répartis sur plusieurs sites en France et en Suède nous avons montré que la coupe d’arbre adulte pour augmenter l’ouverture de la canopée accentuait l’effet négatif des cervidés sur la croissance et la survie de jeunes semis de Chêne, via une plus forte fréquentation des cervidés dans les patches de régénération ouverts. Enfin, suite à l’implémentant du processus d’herbivorie dans un modèle de dynamique forestière, les simulations effectuées suggèrent que sous une forte pression d’herbivorie, des opérations de dégagement moins fréquentes et maintenant des espèces accompagnatrices appétentes comme le Charme permettraient de réduire l’influence négative des cervidés sur la croissance du Chêne. En conclusion, les résultats de cette thèse étayent l’hypothèse que les cervidés représentent une contrainte significative pour le processus de régénération du Chêne, mais suggèrent qu’une gestion de la végétation de sous-bois adaptée permettrait de réduire cette contrainte et de se rapprocher d’un équilibre plus durable entre faune sauvage et activités sylvicoles.

Devenir et la (bio)disponibilité de contaminants dans les sols

Habilitation à diriger les recherches soutenue le 16 septembre 2021 à AgroParisTech (Paris)

Jury composé de :

M. Jean-Marc Choubert (INRAE, UR REVERSAAL)

M. Yves Coquet (AgroParisTech, UMR Ecosys)

M. Sébastien Sauvé (université de Montréal, Département de Chimie)

Mme Aurélie Cébron (CNRS, UMR LIEC)

Mme Cécile Quantin (université Paris-Saclay, UMR GEOPS)

Mme Siobhan Staunton (INRAE, UMR Eco&Sols)

Les activités humaines peuvent être à l’origine de la présence d’éléments traces et de contaminants traces organiques dans les sols. Ils peuvent potentiellement entraîner des dys-services en altérant la qualité des productions alimentaires, produisant des effets non souhaités chez les organismes vivants. Il est donc essentiel de maîtriser les flux entrant dans les sols, de pouvoir prévoir le devenir des contaminants dans les sols, qui dépend de processus physiques, physicochimiques et biologiques, de facteurs biotiques et abiotiques.

Les travaux de recherche ciblent en particulier le déterminisme des processus du devenir et l’évaluation de la (bio)disponibilité des contaminants dans le sol avec en jeu : l’immobilisation des contaminants et sa potentielle réversibilité ; la modulation de l’exposition des microorganismes selon le mode d’apport des contaminants dans le sol (ex. avec des déchets organiques traités) ou selon l’hétérogénéité des conditions via les pratiques.

L’approche méthodologique choisie s’appuie sur des expérimentations en conditions contrôlées à différentes échelles (microcosmes, colonnes, pilotes), parfois confrontées à des échelles réelles, in situ. Les expérimentations peuvent être couplées à la modélisation dans l’optique de mieux comprendre les processus et de prédire le devenir (et la disponibilité).

Les perspectives de recherche, dans la continuité des travaux effectués, concernent : l’évaluation de la biodisponibilité de contaminants organiques dans des contextes diversifiés (milieux, organismes dont les plantes), et l’amélioration de la description des interactions entre les contaminants organiques et les matrices solides, en lien avec leur dissipation au cours des traitements des déchets organiques et dans les sols. Elles contribueront à mieux estimer l’exposition d’organismes aux contaminants organiques et ainsi mieux évaluer le risque environnemental.

Développement d’un modèle de dynamique forestière à grande échelle pour simuler les forêts françaises dans un contexte non-stationnaire

par Timothée AUDINOT

Thèse soutenue publiquement le 13 octobre 2021 à Nancy

Directeur de thèse : M. Jean-Daniel Bontemps (Laboratoire d’Inventaire forestier, IGN)

Codirecteur de thèse : M. Holger Wernsdörfer (AgroParisTech Nancy)

Contexte. Depuis la révolution industrielle, les forêts européennes connaissent une dynamique d’expansion de leur surface et de leur stock de bois. Cette expansion, conjuguée au changement climatique, entraîne des modifications des processus de dynamique forestière. L’émergence de la bioéconomie européenne augure dans ce contexte d’évolutions des stratégies de gestion forestière à l’échelle européenne et nationale. La simulation des ressources forestières futures et de leur pilotage par des modèles à grande échelle spatiale est donc indispensable pour fournir des outils de planification stratégique. En France, les ressources forestières se caractérisent par une diversité marquée par rapport à d’autres pays européens. Le modèle de dynamique forestière MARGOT (MAtrix model of forest Resource Growth and dynamics On the Territory scale), a été mis en place par l’Inventaire forestier national (IFN) en 1993 pour simuler les ressources forestières françaises à partir des données de cet inventaire, mais n’a été l’objet que de travaux de recherche restreints depuis son origine. Ses simulations restent limitées à un horizon temporel restreint (inférieur à 30 ans), sous des scénarios de gestion de type business as usual, et ne tenant pas compte des contextes forestiers et environnementaux non-stationnaires.

Objectifs. Cette thèse a pour ambition générale de consacrer un effort de recherche de rupture sur le modèle MARGOT, afin d’aborder les enjeux forestiers actuels. Les objectifs précis sont : de déterminer la capacité du modèle MARGOT à restituer l’expansion forestière française sur une période rétrospective longue (1971-2016) ; de prendre en compte de façon synthétique de l’hétérogénéité des forêts à grande échelle ; de prendre en compte le phénomène de densification des forêts dans la dynamique démographique ; d’inclure les forçages climatiques externes dans la dynamique de croissance des forêts ; dans un contexte devenu très incertain, de pouvoir mesurer le niveau d’incertitude des simulations résultant de l’erreur d’échantillonnage de l’inventaire forestier au regard des évolutions tendancielles considérées. Le développement de scénarios de gestion forestière reste hors du champ de ce travail.

Principaux résultats. Une méthode générique de partition des forêts selon leur hétérogénéité géographique et compositionnelle a été mise en place, avec une vocation applicative à d’autres contextes forestiers européens. Une méthode de propagation de l’incertitude d’échantillonnage aux paramètres du modèle, puis aux simulations, a été développée à partir d’approches de ré-échantillonnage de données et de modélisation d’erreurs. Une approche originale d’intégration des phénomènes de densité-dépendance démographique, fondée sur une métrique de densité et la réintroduction d’un concept de « peuplement forestier » adapté à ce modèle, a été développée. Une stratégie d’intégration des forçages climatiques des paramètres démographiques du modèle a été développée à partir d’une approche d’hybridation entrées-sorties avec le modèle fonctionnel CASTANEA pour un sous-ensemble de la forêt française incluant les espèces de Chênes, de Hêtre, d’Épicéa commun, et de Pin sylvestre. L’ensemble de ces développements a permis de réduire très notablement le biais de prédiction du modèle initial.

Conclusions. Les développements consentis font du modèle MARGOT un outil d’exploration et de planification plus fiable des ressources forestières, et reposant sur une approche de modélisation originale et unique en Europe. L’utilisation de statistiques forestières anciennes permettra d’évaluer le modèle et de simuler le stock de carbone de la forêt française sur un horizon temporel plus importante (de plus de 100 ans). Une évaluation approfondie des performances de ce nouveau modèle par des simulations intensives doit être conduite.

Auteurs


Rédaction

anne-marie.huin@agroparistech.fr

Pays : France

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