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La naturalité à petit pas. Evolution des regards et des pratiques sur une notion émergente

Résumé

Si la forêt incarne la nature pour les Français, la notion de naturalité leur est beaucoup moins familière et leur semble relever du sauvage. Pourtant, certains signes montrent que ces représentations évoluent : les bois morts sont désormais tolérés, voire promus pour leur qualité écologique par les forestiers comme par le public ; les espaces dédiés à la naturalité tels que les réserves biologiques intégrales sont de plus en plus nombreuses sur le territoire métropolitain. Les raisons de cette adhésion restent cependant ambivalentes. Certains forestiers et usagers de la forêt le font pour éviter d’être accusé de négligence environnementale alors que d’autres sont vraiment convaincus de l’intérêt de laisser des espaces en libre évolution pour la biodiversité et la résilience des forêts face aux changements climatiques. Dans les deux cas, la naturalité retrouve progressivement et bon gré mal gré une place dans nos écosystèmes forestiers et nos représentations de la forêt.

Abstract

While the forest represents nature in French people’s minds, the notion of naturalness is far less familiar to them and appears to be related to “the wild”. However, certain signals show that these representations are evolving: deadwood is now tolerated, and even promoted for its ecological relevance by foresters as well as by the general public; spaces devoted to naturalness, such as integral biological reserves, are more and more numerous in mainland France. However, the reasons for this support remain ambivalent. Some foresters and forest users do it to avoid being accused of environmental negligence, while others are really convinced of the interest of leaving spaces unmanaged for the sake of biodiversity and of forest resilience to climate change. In both cases, naturalness is gradually and willy-nilly regaining importance in our forest ecosystems and our representations of forests.

Introduction

Depuis quelques années, les notions de naturalité, de forêt en libre évolution, de rewilding émergent dans les scènes de débats scientifiques. Des colloques leur sont consacrés (Vallauri et al., 2010), des représentants d'associations de protection de la nature promeuvent ces approches, et certains forestiers les mettent en œuvre dans des zones spécifiquement dédiées. Mais que représentent ces notions pour les usagers et les propriétaires forestiers au quotidien ? Quels espaces forestiers et quels objets concrets incarnent cette naturalité à leurs yeux aujourd'hui ? Comment l'interprètent-ils ? Qu'est-ce que cela révèle de l'évolution de leurs rapports à la nature ?

Notre article proposera tout d’abord un bref rappel historique montrant comment différents acteurs de la forêt au XIXe siècle ont progressivement mis à l’écart de manière coordonnée et intentionnelle les formes d’expression les plus sauvages d’une nature qu’ils pensaient pourtant imiter. Nous verrons ensuite qu’aujourd’hui, si nombre d’enquêtes s’intéressent au rapport des Français à la nature, celles-ci décrivent avant tout des relations à des forêts gérées où les formes d’expression les plus « sauvages » de la nature sont souvent bridées et orientées. Du côté des propriétaires et des gestionnaires forestiers, nous verrons également que cette notion de naturalité suscite des réactions diverses, allant de l’adhésion la plus engagée à de très fortes réticences.

Cadre analytique et méthode

Pour étudier la notion de naturalité, définie comme la libre expression des dynamiques naturelles depuis le point de vue des sciences humaines et sociales, nous mobilisons la notion de représentation. Celle-ci est définie comme une « forme de connaissance, socialement élaborée et partagée, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social » (Jodelet, 2003). Une représentation renvoie donc à des dispositions élaborées socialement et historiquement, et porte en elle des valeurs, c'est-à-dire des principes généraux d’inspiration morale qui orientent l’action des individus en société en leur fixant des buts, des idéaux, autrement dit, en leur donnant des moyens de juger de leurs actes. Si ces représentations s’institutionnalisent avec le temps, elles restent néanmoins dynamiques. Certaines disparaissent quand d’autres émergent souvent à la suite d’un travail de catégorisation mené par des groupes d’intérêt spécifiques. En choisissant cette entrée analytique par les représentations, nous postulons donc que la notion de naturalité et plus généralement le rapport homme/nature est d’abord un construit social, sujet à des jugements de valeur et à des rapports de pouvoir.

Pour réaliser ce travail exploratoire sur les représentations associées à la notion de naturalité en forêt, nous mobilisons divers matériaux :

— une analyse sociohistorique des rapports homme/forêt au cours des deux derniers siècles : cette analyse permet de voir comment se sont forgées des représentations communes de la forêt, comment elles se sont sédimentées et ancrées très profondément dans l’imaginaire collectif des usagers et des forestiers, et comment et pourquoi elles ont peu à peu divergé au point de devenir parfois conflictuelles ; cette entrée permet aussi de voir la très grande proximité, voire la quasi-assimilation de la forêt comme incarnation d’une forme de nature ;

— une recension des enquêtes et sondages d’opinion réalisés depuis une vingtaine d’années sur l’opinion et les pratiques des Français en forêt ;

— deux études de cas, qui, si elles ne sont pas spécifiquement centrées sur la notion de naturalité, nous permettent de voir comment cette notion transparaît à travers des objets ou des espaces susceptibles d’y faire référence. Une de ces études porte sur les représentations associées au bois mort en France et en Allemagne et l’autre sur les pratiques et représentations de la naturalité dans une zone géographique à l’intersection d’un espace protégé (une zone Natura 2000) et d’une forêt de production à haut rendement. Ce dernier cas d’étude permettra de voir que la séparation entre naturalité et artificialité est plus complexe qu’il n’y paraît.

La forêt, symbole équivoque de la nature

La notion contemporaine de naturalité reflète une évolution assez radicale de nos rapports à la nature et en particulier à la forêt. Si elle incarne aujourd'hui des valeurs plutôt positives selon les rares enquêtes qui abordent de front cette notion (Le Quéau et al., 2010 ; Royer, 2018), il aura fallu près de deux siècles d'évolution de nos représentations pour que cette notion accède à une certaine visibilité sociale et politique. De la selva oscura de Dante à la Gaste Forêt de Chrétien de Troyes, la forêt est un espace aux représentations contrastées. Pour la noblesse, la forêt est un espace de loisirs où les aptitudes guerrières sont entretenues à travers la pratique de la chasse. Pour le clergé, c'est l'incarnation occidentale du désert érémitique, un lieu d'anciens cultes païens dont il fallait effacer le souvenir. Quant aux communautés rurales, elles y voyaient à la fois un endroit plein de ressources (morts-bois, glandée, vaine pâture, champignons, herbes médicinales, etc.) mais aussi un espace dangereux, peuplé de brigands, voire d'entités imaginaires plus ou moins hostiles (Larrère & Nougarède, 1993).

Cette vision ambivalente de la forêt — mythique et dangereuse à la fois — est entérinée par les naturalistes eux-mêmes. Buffon (1764) pourfendait ainsi la « Nature brute hideuse et mourante » et ces contrées « hérissées de bois épais et noirs dans toutes les parties élevées, des arbres sans écorce et sans cime, courbés, rompus, tombants de vétusté ». Tous les éléments qui attirent aujourd’hui l’attention des naturalistes contemporains le révulsaient : « vieux arbres chargés de plantes parasites, de lichens, d’agarics, fruits impurs de la corruption ». Livrée à elle-même, la nature n’est donc que sauvagerie. Seule une intervention humaine radicale lui semble à même de remettre la nature sur le droit chemin : « Mettons le feu à cette bourre superflue, à ces vieilles forêts déjà à demi consommées ; achevons de détruire avec le fer ce que le feu n’aura pu consumer ». Si cette reprise en main a des visées esthétiques, elle a aussi clairement des objectifs économiques : « Qu’elle est belle, cette Nature cultivée ! Que par les soins de l’homme elle est brillante et pompeusement parée ! (…). Il [l’homme] met au jour par son art tout ce qu’elle recelait dans son sein ; que de trésors ignorés, que de richesses nouvelles ! » (Buffon, 1764).

Au XIXe siècle, les représentations de la forêt évoluent nettement. Les peintres dits de l’École de Barbizon jouent un rôle majeur dans ce changement de regard (Kalaora, 1993). S’ils font de la forêt un symbole de nature, ils véhiculent surtout une vision esthétisante, reprise par les guides touristiques tels celui publié en 1839 par Dénécourt. Son guide propose une grille de lecture qui permet au profane de décrypter l’espace forestier en une série d’éléments pittoresques comme les points de vue, les arbres séculaires, les zones de rochers, les sous-bois sombres, les entrelacs de la végétation, etc. Il vise à baliser l’espace en indiquant ce qui mérite d’être vu, admiré et retenu. Les éléments sélectionnés mettent en exergue les valeurs censées être recherchées par le visiteur : la domination de l’espace et du paysage, la monumentalité, l’ancrage historique, l’insolite et le pittoresque. Hors de ces séries artistiques où l’administration forestière cesse toute intervention sylvicole à la demande des peintres de Barbizon, la sauvagerie et l’imprévisibilité de la nature restent difficiles à promouvoir dans les secteurs plus fréquentés et les zones de production. Des forestiers comme Huffel, professeur d’économie forestière à Nancy (1910), militent cependant pour élever certaines zones de forêts au statut de « monuments naturels », parlant même de « bois sacrés » (Huffel, 1910). Cet intérêt pour une nature en partie libérée de son carcan gestionnaire se retrouve chez d’autres forestiers comme Philibert Guinier, ancien directeur de l’École forestière qui participa en 1948 à la création de l’Union internationale pour la protection de la nature, ancêtre de l’UICN. Roger Ducamp, conservateur des Eaux et Forêts et fondateur de l’École de Nîmes, milite aussi dans les années 1920 pour la création de « réserves de nature » où le reboisement artificiel serait banni au profit de la régénération naturelle. Il défend l’idée de différer les interventions sylvicoles, voire de ne pas intervenir du tout plutôt que de vouloir recréer un peuplement forestier de toute pièce et à des coûts économiques souvent élevés (Mure & Lepart, 2006). Cette prise de conscience de l’intérêt de conserver des espaces forestiers où l’intervention de l’homme serait minimale se traduit par la création de la première réserve biologique en forêt domaniale de Fontainebleau en 1953. Ces initiatives restent cependant isolées et anodines au regard de la modernisation de la sylviculture lancée à la suite de la création du Fonds forestier national en 1947. À l’expression de la nature, les techniciens de la forêt opposent l’intensification et la standardisation des méthodes de sylviculture. La rationalisation des méthodes de gestion laisse alors peu de place aux éléments non directement consacrés à l’amélioration de la production. Lagunes, tourbières, forêts feuillues peu productives et peuplements sénescents disparaissent au profit de plantations gérées de manière intensive.

Au début des années 1970, les associations de protection de la nature interrogent cette orientation productiviste. Elles dénoncent ainsi pêle-mêle les coupes rases, les enrésinements, la disparition de milieux écologiques fragiles, etc. (Cauwet et al., 1976). Mais, pour les représentants de l'administration forestière, ces revendications sont sans fondement, en particulier celles visant à réintroduire de la naturalité en forêt. Selon Louis Bourgenot (1973), directeur technique de l'ONF, la forêt naturelle est un mythe « pernicieux et irréalisable » (Bourgenot, 1973, p. 359). Et, face à « l'enfer vert » que représente une forêt livrée à elle-même, il met en avant le travail du forestier qui « cherche à amener la forêt vers un état d'équilibre secondaire [le paraclimax] tel qu'il présente à la fois le maximum d'utilités pour l'homme » (id., p. 353). Il lui paraît donc impossible « d'aller jusqu'aux extrémités où voudraient les entraîner les tout nouveaux et tout récents amateurs de forêt » (id., p. 340). Ces aspirations à plus de naturalité ne sont pourtant pas l'apanage des seuls écologistes. Les enquêtes menées auprès du public au long des années 1970 et 1980 montrent que les usagers considèrent de plus en plus la forêt comme « un milieu naturel opposé à l'univers urbain » (SARES, 1969, p. 51). Ces aspirations sont cependant ambiguës car le retour d'une forme de naturalité, voire de sauvagerie réveille aussi quelques peurs ancestrales, celles de se perdre, de se sentir en insécurité, de devoir faire face à une faune potentiellement hostile. De fait, les responsables forestiers oscillent tout au long des années 1970-1980 entre l'idée de créer des aménagements favorisant l'accueil sécurisé — mais aussi orienté et contrôlé — des usagers et celle visant à introduire un peu plus de naturalité. Cette dimension n'a cependant rien de fonctionnel, les forestiers cherchant surtout à dissimuler leurs interventions. Ils ne se cachent même pas de ce double jeu comme l'exprime le chef du centre de gestion de l'ONF à Fontainebleau : « cela conduit à n'envisager que des aménagements de qualité, parfaitement adaptés et intégrés au décor, extrêmement sobres et discrets, uniquement conçus de façon à mettre en valeur le paysage. À la limite, l'idéal serait que le touriste, guidé inconsciemment, ne s'aperçoive pas de l'intervention du forestier » (de Buyer, 1970, p. 793). Dans les années 1970-1980, cette euphémisation de la réalité des opérations sylvicoles est codifiée de manière très précise tout d'abord au Royaume-Uni sous le terme de forest landscape design afin d'atténuer les effets paysagers et le côté visuellement artificiel des boisements résineux sur d'anciennes landes (Crowe, 1978). Puis cette technique est importée et adaptée en France sous le terme de paysagisme d'aménagement (Breman, 1981). Si cette approche paysagère donne la primauté aux représentations visuelles, esthétiques et culturelles, elle n'intègre que partiellement la dimension écologique. Or, avec l'institutionnalisation de la notion de biodiversité au cours des années 1990, écologues et spécialistes de la conservation inscrivent la conservation des espèces et des écosystèmes au centre du développement durable (Dumoulin & Rodary, 2005). Le terme de biodiversité, de par sa dimension holistique puisqu'il désigne toute forme de vie sur terre et son cortège sémantique — extinction des espèces, gestion du vivant, perte de biodiversité — s'impose peu à peu et se substitue parfois à des termes plus classiques comme celui de nature, notamment sur le plan institutionnel. Si le législateur mentionne ainsi clairement la protection de la nature dans l'intitulé de la loi de 1976, il préfère le terme biodiversité pour qualifier la stratégie nationale (SNB) mise en place en 2004. La nature y est toujours présente de manière centrale à travers les notions de patrimoine, de ressources d'espèces et d'habitats dits naturels mais le sauvage n'est mentionné qu'à travers la notion d'animaux ou d'espèces sauvages. La notion de naturalité n'est elle-même jamais évoquée et ce d'autant moins que le fondement même de la SNB repose sur une gestion active et interventionniste des espèces et habitats menacés. L'idée n'est pas de laisser faire la nature mais de la protéger, la restaurer et la gérer au risque de la transformer en pseudo-nature, dénuée d'autonomie fonctionnelle (Gilg, 2010). Face à ce cadre interprétatif dominant, les forestiers expriment d'abord une certaine hostilité. Dans un article intitulé « Quand l'écologie devient nuisance », Jean Gadant, ancien chef du service des forêts au ministère de l'Agriculture regrette « le dangereux abandon du débat international sur la forêt à des théoriciens intégristes de l'environnement » (Gadant, 1996, p. 409). Alors que les forestiers pourraient être d'importants producteurs de normes en matière de biodiversité de par leurs connaissances et leurs relations privilégiées à la forêt, certains de leurs représentants à l'image du Groupe des Neuf 1(1) se méfient de cette notion et s'opposent à la mise en œuvre de la directive Habitats à la fin des années 1990 (Alphandéry & Fortier, 2007). Comprenant cependant l'intérêt stratégique de cette notion et préférant être force de proposition, certains responsables forestiers militent au sein même du ministère en charge des forêts pour que ces questions soient prises en compte (Barthod, 1993 ; Barthod, 1995). Cette attitude proactive se traduit par la mise en place d'indicateurs de gestion forestière durable dès 1993 (Barthod, 2012) et d'un plan d'action forêt en 2006, déclinaison sectorielle de la SNB et du programme forestier national 2006-2015. Ce plan d'action forêt mentionne cependant que les objectifs de conservation de la nature ne peuvent pas tous être atteints par la gestion forestière durable et que « les habitats exceptionnels, dont l'état de conservation demande une attention ou une gestion particulière, doivent bénéficier de mesures de protection renforcées par voie réglementaire ou contractuelle » (Ministère de l'Agriculture et de la Pêche, 2006). Le législateur a donc estimé que le laisser-faire nécessitait, au préalable, une sanctuarisation forte des espaces dédiés à la naturalité. L'ONF va ainsi renforcer à partir de 1998 son réseau de réserves biologiques dirigées (RBD) et de réserves biologiques intégrales (RBI). Alors qu'entre 2007 et 2021 le nombre de RBD reste stable en surface (22 500 à 25 150 ha) et en légère diminution en nombre (154 à 129 RBD), le nombre de RBI double en nombre (37 à 71 RBI) comme en surface (15 500 à 28 340 ha). Le qualificatif “intégral” n'implique cependant pas une mise sous cloche totale. Si l'exploitation forestière, les travaux sylvicoles et la chasse au petit gibier sont exclus, la fréquentation du public est autorisée. Si les différents outils législatifs convergent donc vers une plus grande prise en compte des enjeux environnementaux en forêt au cours des années 1990-2000, les principes qui les sous-tendent paraissent parfois s'opposer. Alors qu'au sein des RBI des formes les plus sauvages de naturalité semblent pouvoir s'exprimer non sans une certaine surveillance, celles-ci sont au contraire très cadrées au sein des zones Natura 2000. Sous couvert de conservation de la biodiversité, chaque acte de gestion est défini et normalisé au sein de documents de gestion (DOCOB). Cette démarche gestionnaire s'avère alors assez éloignée d'une naturalité définie comme l'expression d'une dynamique spontanée et autonome de la nature (Vallauri et al., 2010).

Rapports à la nature ou à la forêt gérée ? Dans la nébuleuse des enquêtes d’opinion

Si la notion de naturalité suscite des débats assez poussés entre spécialistes, il est en revanche beaucoup plus difficile de savoir ce que cette notion inspire aux usagers de la forêt. Les enquêtes d'opinion offrent seulement des indications d'ordre général. L'enquête « Forêts-Sociétés », menée en 2015 par l'ONF auprès d'un échantillon représentatif de la population française, montre que 68 % des Français considèrent la forêt comme un espace de nature et 59 % comme un réservoir de biodiversité (Cordellier & Dobrée, 2017). La production de bois n'arrive qu'en 7e position à 39 %. Dans le même ordre d'idée, 63 % des enquêtés jugent nécessaires les actions visant à protéger la biodiversité et seulement 19 % celles visant à produire du bois. La dernière enquête menée en 2021 conforte ces résultats puisque 92 % des enquêtés estiment que « la forêt procure un lien avec la nature » (Viavoice & ONF, 2021). Quant aux sujets liés à la forêt qui intéressent le plus les enquêtés, 49 % d'entre eux citent « La nature, les arbres, la faune, la flore » et citent pêle-mêle « les arbres », « la saisonnalité, la vie sauvage », « les essences d'arbres, les animaux de toutes sortes ». Puis viennent les sujets liés à l'écologie, 24 % des enquêtés se disant intéressés par « l'évolution des forêts dans le changement climatique, leur protection » et seulement 6 % par « l'entretien, la gestion, l'aménagement des forêts ». Parmi les bienfaits associés à la forêt, 58 % des enquêtés citent d'abord les bienfaits personnels et psychologiques et 41 % les rôles fonctionnels tels que la production d'oxygène, fonction déjà reconnue par les mouvements hygiénistes du XIXe siècle et, signe des temps, le stockage du carbone vu comme un moyen d'atténuer le réchauffement climatique. La fonction écologique est le troisième type de bienfait cité par 26 % des enquêtés qui considèrent la forêt comme des « espaces naturels, qui protègent tout un écosystème (faune et flore) », un « lieu de vie pour la faune et la flore », « un refuge pour certains animaux et insectes qui permet de préserver une certaine biodiversité », « l'osmose avec la nature le vert », « un contact avec la nature ». Ces sondages abordent cependant les questions de nature, de biodiversité et de naturalité de façon superficielle ; ils ne permettent pas vraiment d'approfondir chacune de ces notions et entretiennent finalement une relative confusion entre ces notions du fait de leur amalgame. À l'inverse, et même si leurs échantillons étaient plus limités, des enquêtes qualitatives ont permis d'explorer la notion de naturalité de façon plus précise. Le Quéau et al. (2010) ont ainsi étudié les pratiques de fréquentation dans deux sites forestiers du massif de la Chartreuse (Isère), le col de Porte situé en zone périurbaine et la combe de l'If classée comme espace naturel sensible (ENS), auprès d'un échantillon de 60 personnes. Ils montrent que la naturalité de ces deux espaces est un des éléments qui détermine le choix du site de promenade fait par les enquêtés, les uns préférant se promener dans la forêt plutôt “entretenue” du Col de Porte et les autres dans la forêt plutôt “naturelle” de la combe de l'If. Ils montrent aussi que la naturalité forestière discrimine ses publics potentiels. Les visiteurs de l'ENS sont plus jeunes, plus diplômés, et appartiennent à des catégories plus élevées dans la hiérarchie sociale que ceux de la forêt périurbaine. Outre des raisons pratiques comme l'accessibilité, la naturalité apparaît donc comme un critère de distinction sociale. Elle génère aussi des états subjectifs très différents allant du « bonheur proche de l'extase au malaise le plus sombre ». À ce titre, la progression des lisières forestières et l'intrusion des animaux sauvages incarnent pour les habitants les plus âgés une forme de naturalité perçue négativement. Elles sont le symbole de l'abandon, d'un laisser-aller et le signe avant-coureur d'un âge d'or révolu doublé d'une crispation identitaire. À l'inverse, les enquêtés les plus sensibles à l'écologie plébiscitent ce type d'espace, se posent en observateur et souhaitent interférer le moins possible avec ce qui est perçu comme le fonctionnement « naturel » de la forêt. La naturalité, dans ce contexte, est valorisée de façon positive. Mais pour le plus grand nombre, la naturalité est d'abord d'ordre paysager et une échappatoire aux désagréments de la civilisation urbaine. La rêverie du promeneur renvoie à des souvenirs d'enfance et de jeunesse entretenus par un prolifique imaginaire de la forêt. Quelques enquêtés nourrissent cependant une certaine méfiance, voire une appréhension. L'obscurité de la forêt, en particulier, peut encore inquiéter ; la privation relative du sens de la vue (effective, en l'occurrence) fait redouter un risque de désorientation ; le fait qu'elle soit abandonnée laisse craindre la possibilité d'une chute, tandis que le bois mort et sec au sol évoque le risque d'incendie, etc. La naturalité s'apprécie alors d'autant mieux que la forêt est “visitable” dans de bonnes conditions de confort et de sécurité. Dans une enquête sur le sentiment de naturalité menée dans le bois de Païolive (Ardèche), Morge a aussi montré que cette confrontation à la naturalité fait évoluer les représentations des enquêtés (Morge, 2012). Alors qu'ils pouvaient avoir initialement une représentation négative des espaces en libre évolution, une expérience au cœur de ce type de zone peut transformer positivement cette représentation, notamment par sa capacité à offrir une déconnexion de l'environnement humain.

Ces enquêtes consacrent des représentations déjà présentes au XIXe siècle mais témoignent aussi de leur renouvellement, la forêt incarnant désormais un des paradigmes de la nature comme la mer ou la montagne (Eizner, 1995). Les usagers y associent aussi plus ou moins implicitement la version modernisée et gestionnaire de la nature à savoir la biodiversité. Ces représentations révèlent surtout que l’environnement est aujourd’hui un problème social autour duquel tous les discours et projets sociaux doivent être reformulés pour être légitimes (Kalaora, 2001, p. 592). Cette écologisation conduit à un recadrage cognitif et normatif visant à une inflexion écologique plus ou moins forte des normes (légales ou implicites) et des pratiques sociales en vigueur dans le domaine considéré (Ginelli, 2017). Du côté des professionnels forestiers, cette écologisation s’est traduite par la reconnaissance de la multifonctionnalité des forêts par la loi d’orientation forestière de 2001, la mise en œuvre d’une stratégie pour la biodiversité en 2004, la production d’écolabels (PEFC/FSC), l’augmentation des surfaces de RBI en forêt publique, des changements de pratiques sur le terrain tels que la quasi-disparition des traitements phytosanitaires, le maintien de bois morts au sol et debout, etc. Du côté des usagers, l’écologisation s’incarne à travers des activités dites de « pleine nature », allant de la classique randonnée sur sentiers balisés, à la sylvothérapie, jusqu’aux expériences plus extrêmes de survivalisme en forêt. Ces activités en forêt sont promues pour le bien-être physique et psychologique de leurs pratiquants, y compris quand la confrontation à la nature est à l’origine d’un problème de santé. Dodier (2019, p. 150) constate ainsi que des personnes infectées par la maladie de Lyme dans le cadre de la pratique de la course d’orientation continuent de parcourir les espaces forestiers de façon assidue, en faisant de cette fréquentation une condition de leur capacité à supporter les formes persistantes de la maladie. Cette attitude montre une surévaluation des aspects prophylactiques et, de façon encore plus affirmée, une sous-évaluation manifeste des risques pathogènes (Dodier, 2019). La forêt, à condition que celle-ci soit gérée de manière « naturelle », apparaît donc comme un remède à presque tous les maux, ceux du corps, de l’âme et de la société.

Le bois mort, « moche et méchant » ou « sauvage utile » ?

Dans une enquête récente (CGDD, 2020) où un panel représentatif de la population française était invité à se prononcer entre deux propositions distinctes, 71 % des enquêtés jugeaient qu'il était préférable de « laisser la nature se développer même si cela peut poser des problèmes pour les activités humaines », tandis que 29 % estimaient qu'il valait mieux « privilégier les activités humaines, en contrôlant le développement de la nature ». Pourtant, les signes matériels et concrets d'une nature laissée à elle-même suscitent souvent des réactions mitigées. À cet égard, si la présence d'arbres morts en forêt symbolise le retour à une nature ré-ensauvagée pour les associations de protection de la nature et les écologues, ce parangon de biodiversité reste mal aimé des usagers en France (Dobré et al., 2006). Alors que les coupes rases font l'objet de vives polémiques médiatiques, 28 % seulement des enquêtés appréciaient peu ou pas du tout la présence d'arbres coupés en bord de routes ou au sein des parcelles dans l'enquête ONF de 2005 (Dobré et al., 2006). En revanche, 50 % des enquêtés regrettaient la présence d'arbres morts. Cette proportion n'a presque pas baissé dans l'enquête de 2015 puisque 46 % des enquêtés n'appréciaient toujours pas la présence d'arbres morts (Cordelier & Dobrée, 2017).

Des enquêtes plus précises montrent toutefois que ces appréciations varient en fonction du type de public et du statut des forêts concernées. Des études menées en Allemagne dans le Harz et en Bavière (Rathmann et al., 2020 ; Sacher et al., 2017) montrent que les visiteurs acceptent plus facilement la présence d'arbres morts dans les forêts bénéficiant d'un statut de protection spécifique du type parc national que dans les forêts sans statut particulier autour de chez eux. Trouver du bois mort dans un espace dédié à la conservation de la nature leur paraît tout à fait normal, 85 % des visiteurs interrogés associant la présence de bois mort à la biodiversité. Mais 50 % des enquêtés pensent aussi que la présence d'arbres morts est synonyme de perte économique et 40 % d'une esthétique plutôt négative. Ce jugement esthétique varie en fonction du type de bois mort identifié. Si 93 % des enquêtés apprécient de voir des souches coupées et encore présentes dans le sol, 59 % acceptent aussi les troncs couchés et 56 % des arbres morts debout. Plus les bois morts sont récents et plus les opinions sont mitigées (46 % d'opinions favorables). À l'inverse les vieilles souches, même en partie décomposées, recueillent plus de 70 % d'opinions favorables. La proximité de l'événement qui a poussé à couper les arbres — élagage, éclaircie ou coupe d'exploitation — semble donc jouer négativement sur la perception des enquêtés. À l'inverse, la présence de bois morts très décomposés rappelle le rôle joué par ses éléments dans la fertilisation des sols et annonce l'avènement d'un nouveau cycle pédo-sylvicole.

La dichotomie entre intérêt du bois mort pour la biodiversité et ses qualités esthétiques diversement appréciées se retrouve dans de nombreuses études comme si le mariage du « bon » sur le plan écologique et du « beau » sur le plan esthétique semblait difficile. Cette ligne de fracture qui remonte au XIXe siècle paraît encore relativement bien ancrée. L'écologisation serait-elle alors superficielle au point de s'effacer dès lors que la qualité esthétique des lieux serait modifiée ? Rien n'est moins sûr comme le montre une enquête comparative que nous avons menée en 2017 auprès d'un échantillon de 505 habitants du Pays de Sault dans les Pyrénées audoises (Brahic et al., 2021). Les forêts de sapins de cette petite région naturelle ont subi un dépérissement massif suite à la sécheresse exceptionnelle de 2003. De grandes coupes sanitaires ont été réalisées mais beaucoup d'arbres morts sont restés sur place. Quinze ans après cet événement, l'opinion des habitants sur les arbres morts est partagée. 75 % des enquêtés ne considèrent pas le bois mort comme un déchet ou qu'il soit inutile. Si 32 % d'entre eux jugent que sa présence dégrade la qualité des paysages, 40 % sont de l'avis opposé. Malgré des épisodes réguliers de mortalité moins catastrophiques que ceux de 2003 mais qui auraient pu en raviver le souvenir, 45 % des enquêtés souhaitent le maintien des bois morts et 27 % leur enlèvement. Cette tolérance vis-à-vis des bois morts s'explique par le fait que 80 % des enquêtés jugent leur présence importante pour la survie d'espèces rares (scarabées, champignons, lichens) et 82 % pour la fertilité des sols. Pour 53 % des enquêtés, la présence des bois morts rend la forêt « plus naturelle », 15 % pensant le contraire et 28 % n'ayant pas d'opinion tranchée. Le rôle écologique des bois morts semble donc l'emporter sur la valeur esthétique du peuplement, ce qui montre une évolution des critères de jugement probablement liée à l'écologisation des modes de pensées. À cet égard, Gundersen et al. ont montré que l'apport d'information sur l'intérêt écologique des bois morts améliorait l'adhésion du public à l'idée de conserver ce type de bois en forêt (Gundersen et al., 2017). Mais cette utilité écologique est parfois contrebalancée par une autre forme d'utilité également très ancrée dans nos sociétés, l'utilité économique. 73 % des enquêtés seraient ainsi d'accord pour valoriser les bois morts comme bois énergie. Cet atavisme pour la dimension économique se retrouve chez les propriétaires forestiers, qui tout en admettant la plus-value écologique des bois morts aspirent plus ou moins ouvertement à faire œuvre utile en le brûlant (Deuffic & Lyser, 2012). Pour expliquer ce paradoxe, les usagers comme les forestiers opposent deux arguments écologiquement recevables : conserver du bois mort pour la biodiversité est écologiquement admissible mais le brûler permet de substituer une énergie fossile par une énergie renouvelable. Les deux propositions étant difficilement conciliables, une analyse multivariée montre que les enquêtés se partagent entre un groupe qui met en avant le rôle écologique des bois morts et s'oppose donc à leur valorisation énergétique et un autre groupe qui en a une vision utilitariste et souhaite en faire du bois énergie. Consciente du risque de voir une portion importante de la biodiversité saproxylique partir en fumée, l'Ademe recommande d'éviter la récolte des rémanents, ce que les propriétaires forestiers semblent avoir en partie intégré (Brahic & Deuffic, 2017).

Photo 1 Bois mort couché dans une parcelle en régénération naturelle, Parc national de la forêt de Bavière
Photo © Lucas Sire

Photo 2 Bois mort debout conservé comme arbre « habitat » dans une forêt privée du Pays de Sault (Aude)
Photo © Ph. Deuffic

Outre les tensions entre le bon et le beau, l'utile et l'inutile, une autre opposition structure les représentations des enquêtés sur les bois morts, qu'il s'agisse du grand public ou des propriétaires et gestionnaires forestiers. Le bois mort est-il dangereux et le cas échéant pour qui ? Dans le cas des usagers pyrénéens, 43 % des enquêtés pensent que le bois mort n'est pas une source de maladie, ni un refuge pour des insectes nuisibles mais 18 % pensent le contraire. Cette opinion se retrouve aussi chez les professionnels de la forêt qui font la distinction entre les ravageurs primaires qui s'attaquent aux arbres vivants ou affaiblis et les insectes saproxyliques qui ne colonisent les arbres dépérissants qu'après leur mort (Deuffic & Lyser, 2012). La faible relation établie par les enquêtés entre bois morts et augmentation des risques phytosanitaires peut s'expliquer par la nature du phénomène ayant causé le dépérissement, celui-ci étant lié à un stress hydrique et non pas à des attaques phytosanitaires. La même enquête menée dans le parc national de la forêt de Bavière tend à corroborer cette hypothèse : 27 % des enquêtés allemands estiment que le bois morts est une source de maladie et d'insectes nuisibles et autant pensent le contraire. Dans le cas bavarois, les dépérissements sont liés à de très fortes attaques de ravageurs primaires. Cette confusion dans l'attribution des causes du dépérissement est accentuée par les discours des autorités forestières du Land de Bavière. Celles-ci recommandent en effet de couper et évacuer les arbres infestés aussi vite que possible, suggérant que les bois morts constituent des réservoirs de ravageurs. L'ampleur de ces attaques phytosanitaires et leur caractère plus ou moins incontrôlable renforcent d'ailleurs la méfiance des enquêtés vis-à-vis des capacités des forêts à se remettre naturellement des perturbations : 75 % des Français estiment que pour lutter contre le réchauffement climatique aujourd'hui, il vaut mieux entretenir les forêts plutôt que laisser faire la nature (25 %) (BVA & PEFC France, 2020). Cette idée est partagée par certains scientifiques et professionnels forestiers qui, au vu de la rapidité des changements en cours, envisagent notamment une migration assistée des espèces (Sansilvestri et al., 2015). D'autres privilégient au contraire des solutions fondées sur la nature et la résilience des forêts, c'est-à-dire leur capacité à se remettre des aléas avec un minimum d'intervention humaine, voire la combinaison des stratégies ou « grey-green strategy » (Accastello & Brun, 2019).

N'étant pas un péril pour les bois vivants, les bois morts sont-ils un danger pour les humains ? 17 % des enquêtés pyrénéens et 10 % des enquêtés bavarois considèrent les arbres morts comme une source de danger pour les promeneurs, mais une majorité (56 et 53 %) pensent le contraire. De fait, les bois morts sont rarement sources d'accidents. Selon une étude exploratoire menée sur deux années consécutives (2003 et 2004) dans les forêts domaniales françaises, des arbres morts étaient impliqués dans 77 sinistres déclarés — à comparer aux quelque 22 000 collisions annuelles avec des ongulés (Granet et al., 2009). 71 sinistres étaient d'ordre matériel (chute de branches mortes sur des objets immobiles de type voiture ou construction), six autres impliquaient des humains. Trois accidents mortels étaient à déplorer (deux bûcherons tués lors de l'exploitation d'arbres morts et un motard circulant un jour de tempête). Pour limiter ces risques, les référentiels d'aménagement recommandent de couper les arbres morts debout près des zones les plus fréquentées (ONF, 2010).

Les espaces en libre évolution : entre zone de relégation et jardin secret

De même que l'objet bois mort incarne une forme de naturalité, on pourrait s'attendre à ce que des espaces dits « naturels » puissent en faire tout autant. Encore faut-il que le grand public connaisse ces espaces. Si une majorité de Français déclarent connaître et bien savoir ce que sont les parcs naturels régionaux (71 %), les parcs nationaux (70 %), les réserves naturelles (69 %), ils ne sont que 27 % à connaître les sites Natura 2000 (CGDD, 2020). Outre le fait que toutes les formes d'institutionnalisation de la nature n'ont pas la même visibilité, ce type de zones et leur classement au nom de la protection de la biodiversité accompagne selon l'écologue Patrick Blandin, « l'émergence d'un rapport à la nature comptable et manipulateur, pouvant faire le lit d'une nouvelle technocratie »2(2). Ces espaces institutionnels font en effet l'objet de documents qui définissent les modes de gestion les plus appropriés pour la conservation de la biodiversité. Ce faisant, ils interrogent les connaissances ordinaires et les pratiques sylvicoles traditionnelles, ce qui engendre a minima des crispations, au pire des conflits entre gestionnaires des sites et propriétaires fonciers. Pourtant, dans les zones comme Natura 2000, la sylviculture n'est théoriquement pas interdite à partir du moment où celle-ci ne menace pas l'intégrité écologique de la zone. La réalité est cependant plus complexe. Les propriétaires privés peuvent en effet refuser de signer tout contrat ou charte, quitte à faire preuve de « laisser-faire ». Or l'absence d'entretien peut mener à la fermeture de milieux, des essences arborées invasives peuvent se substituer aux essences locales. A contrario, dans des espaces forestiers à haut rendement comme des plantations monospécifiques équiennes où devrait prévaloir l'art du faire et de l'artéfact, les propriétaires et gestionnaires forestiers ne parviennent pas toujours à tout maîtriser et laissent parfois s'échapper, plus ou moins intentionnellement, des traces de naturalité. Une enquête menée en 2013 auprès d'un échantillon de 432 propriétaires forestiers du massif landais (Dehez et al., 2015) montrait ainsi que 61 % des propriétaires forestiers réalisaient des travaux favorables à l'environnement (dont 36 % des maintiens de lisières et 35 % des mélanges d'essences). Si la mise en œuvre de ces actions montre une écologisation partielle de leurs pratiques, les mesures considérées comme les plus à même de renforcer la naturalité telles que le maintien d'arbres morts ou la création d'îlots de vieillissement n'étaient cependant adoptées que par 9 % des propriétaires forestiers interrogés.

Entre des espaces dédiés à la naturalité sur lesquels des interventions sylvicoles sont finalement possibles mais pas toujours mises en œuvre, et des espaces voués en priorité à la production mais où la nature s’exprime par petites touches, des gradients de naturalité existent donc sur le terrain et dépassent la vision duale entre spécialisation et multifonctionnalité des espaces (land sparing vs land sharing). Pour vérifier cette intrication du naturel et de l’artificiel, nous avons réalisé une enquête qualitative exploratoire auprès de 31 propriétaires forestiers privés dans la zone Natura 2000 de la Vallée du Ciron en 2020 dans le Sud-Gironde. L’objectif était de voir comment les enquêtés percevaient la notion de biodiversité et de voir quel gradient de naturalité pouvait être observé dans les pratiques des propriétaires forestiers entre une zone de vallée dédiée à la nature et une zone de plaine vouée quasi exclusivement à la production de Pin maritime.

Concernant la perception de la biodiversité, si 95 % des propriétaires forestiers rencontrés restent en dehors du dispositif contractuel Natura 2000, cela ne signifie pas un rejet des valeurs environnementales. L’attention portée à la biodiversité n’est cependant pas égale chez tous les propriétaires forestiers : un premier groupe (G1) paraît ainsi sceptique vis-à-vis de cette notion. Pour ces propriétaires soucieux de la performance économique de leurs forêts, la biodiversité constitue une forme d’entrave administrative et un gage insuffisant de rentabilité. Leur priorité est d’optimiser la production de Pin maritime, ce qui les conduit à étendre au maximum les zones dédiées à la production. Réduite à la portion la plus congrue, les zones jugées improductives sont souvent totalement délaissées, voire en libre évolution mais toujours susceptibles d’être aménagées en cas d’opportunité économique. Pour ces propriétaires, la biodiversité ne se situe pas tant au niveau intraparcellaire que dans la juxtaposition de plusieurs parcelles de taille et d’âge différents. Pour eux, des coupes rases permettent de retrouver une biodiversité de type landicole alors qu’un peuplement en âge d’être exploité est plus propice à une biodiversité de type forestière. Un autre groupe (G2) est adepte de la biodiversité ordinaire : pour ces forestiers, gestionnaires en « bon père de famille », la biodiversité est un sous-produit de la gestion forestière. Ils identifient les essences « objectifs » (le Pin maritime) mais aussi les essences secondaires comme le Chêne, la « broussaille » (Ajonc, Bruyère, Molinie) et les espèces chassables (ongulés, palombes). Soucieux de garder la nature sous contrôle et d’éviter que l’espace ne devienne « sale » ou « sauvage » ou dangereux, ils effectuent des débroussaillements, réguliers sur le plateau, mais plus légers dans la vallée. Pour le troisième groupe des promoteurs de la biodiversité globale (G3), la biodiversité est une alliée de la sylviculture et ils intègrent son rôle fonctionnel notamment en termes de résilience. Pour eux, prendre en compte la biodiversité ne relève pas d’une attention ou d’une action particulière, mais fait partie du travail du forestier. Cela implique notamment de garder un couvert forestier continu, de régénérer la forêt naturellement et d’éviter autant que possible le travail du sol. Longtemps raillés par les sylviculteurs professionnels et les propriétaires appliquant les méthodes conventionnelles, ces propriétaires assument désormais leur gestion « proche de la nature » dans la vallée comme sur le plateau.

Concernant leur rapport à la naturalité dans la vallée, l’écologisation des pratiques amène l’ensemble des propriétaires forestiers à porter une attention particulière à la conservation des espèces cibles définies dans le document d’objectif du site Natura 2000 (cistude, vison, Hêtre, etc.) mais aussi à des éléments de biodiversité plus généraux. La plupart des enquêtés des trois groupes conservent ainsi les bois morts, les espèces secondaires comme le Chêne, l’Aulne, le Frêne, et divers habitats favorables à la faune locale ordinaire (lisières, ronciers, arbres à cavités). Ils le font à la fois pour se conformer à la logique de conservation qui prévaut sur ce site et éviter de se mettre en porte-à-faux sur le plan réglementaire mais aussi par un réel intérêt, voire plaisir à observer la faune et la flore présentes. Considérant que la zone Natura 2000 n’est pas la plus apte à la production de Pin maritime, ils n’hésitent pas non plus à arbitrer en faveur du maintien d’autres essences et parfois pour des motifs purement esthétiques : « Au bord du Ciron et il y a une chênaie qui pousse et c’est joli et je voudrais garder les plus beaux. Il y a les bordures, des allées et tout ça c’est des jolis Chênes que je garde. (…) Je ne veux pas couper les Chênes. Les Pins, je préfère qu’ils ne poussent pas et garder mes Chênes » (n° C19, Denis, propriétaire et entrepreneur de travaux forestiers, 51 ans). Du fait de la mise en visibilité du caractère exceptionnel et relique des peuplements de Hêtre, les propriétaires forestiers n’exploitent plus cette essence en tant que bois de chauffage comme cela pouvait se faire autrefois et certains participent désormais au programme de restauration des peuplements. Peu d’entre eux s’aventurent dans la zone protégée avec des machines forestières mais ils leur arrivent néanmoins d’exploiter des arbres pour l’autoconsommation en bois de chauffage. Les forestiers du groupe G1 exploitent ainsi parfois les arbres au plus près du périmètre de protection mais sans le franchir pour ne pas s’exposer à d’éventuelles sanctions. Les pratiques sylvicoles les plus conflictuelles ont également quasiment disparu. Les coupes rases et l’usage de produits phytosanitaires sont très rares et, le cas échéant, font l’objet d’une forte réprobation sociale, y compris de la part des propriétaires forestiers voisins. D’autres raisons poussent également les propriétaires forestiers des groupes G1 et G2 à intervenir de moins en moins sur ces zones : le coût de ces opérations, les difficultés d’accès, le manque d’information sur les itinéraires techniques à appliquer dans ce secteur protégé, etc. Après quinze ans d’épreuves de force pour mettre en place le site et négocier le DOCOB, les forestiers des groupes G1 et G2 naviguent donc entre un refus de s’impliquer dans la gestion du site, une surveillance discrète de toutes modifications du périmètre ou des orientations de gestion susceptibles d’interférer avec leurs activités sylvicoles et la réalisation occasionnelle d’opérations sylvicoles (entretien des sous-bois, récolte de vieux pins, coupes de taillis). Pour ces deux groupes, il reste difficile de laisser ces espaces s’ensauvager totalement et de voir disparaître les dernières traces de présence humaine. À l’inverse, les forestiers du groupe G3 affichent une réelle volonté de protection et de renaturalisation de la forêt alluviale. Même s’ils ne contractualisent pas plus que les deux autres groupes, ils s’engagent dans des initiatives de conservation volontaires, telles que la préservation de la hêtraie, le maintien de divers feuillus (Chêne tauzin, Cormier, Alisier, Charme), la création d’îlots de vieillissement et de senescence contribuant ainsi au réensauvagement de la vallée. Ils laissent également les arbres morts en travers des entiers afin de limiter la fréquentation du site et préserver ainsi au maximum la tranquillité de la faune. Leur crainte est de voir la vallée devenir un « hotspot » de biodiversité et attirer un nouveau public en quête d’une « vraie nature ».

Sur le plateau, l’idée de « laisser-faire la nature » est beaucoup plus controversée. Les représentants syndicaux des propriétaires forestiers landais défendent l’idée d’une « forêt cultivée » en réaction au « désert landais » et à l’état de nature contre lequel leurs ancêtres ont lutté pour assainir la région. Leur rapport à cet espace est d’abord celui d’un combat historique contre la nature. De fait, la part de sauvage que les propriétaires admettent en forêt alluviale est vue comme une entrave à l’optimisation de production sur la lande notamment au sein du groupe G1. Pourtant, depuis moins de dix ans, les propriétaires forestiers des groupes G2 et G3 laissent s’exprimer des traces de naturalité au sein même de la pinède. Ils conservent des Chênes en interligne ou en bout de rang, y compris après les coupes rases de Pins. Ils maintiennent parfois quelques lisières feuillues, dont le rôle comme barrière physique vis-à-vis des attaques d’insectes phytophages a été mis en évidence (Jactel & Brockerhoff, 2007). L’intégration plus forte de la biodiversité représente cependant toujours un sacrifice et une complexification de la production pour les sylviculteurs des groupes G1 et G2. Par conséquent, l’écologisation des pratiques forestières sur le plateau est assimilée à une conservation par défaut d’éléments de biodiversité les moins dérangeants par le plus grand nombre de propriétaires.

Photo 3 Maintien de bois morts et d’un mélange de vieux pins et de feuillus dans la vallée du Ciron. Les bois couchés sont laissés afin de limiter la pénétration de tous véhicules
Photo © Ph. Deuffic

Photo 4 Chênes maintenus en bordure de peuplements de Pin maritime
Photo © Ph. Deuffic

Photo 5 Maintien d’un ilot feuillu au milieu d’un peuplement de Pin maritime
Photo © Ph. Deuffic

À ce scepticisme s’ajoute la difficulté pour les propriétaires et gestionnaires du groupe G1 de parler de la forêt dans le registre émotionnel. Ceux-ci s’autocensurent dès lors qu’il est question d’évoquer un rapport sensible à la biodiversité au sein de la forêt cultivée. Dans ces espaces de production, le rapport au vivant relève d’un imaginaire où nature et culture s’opposent depuis la création même de la forêt landaise. Intégrer la biodiversité sur le plateau reviendrait pour ces propriétaires à un changement radical de leur vision de la forêt : ne plus marquer la rupture entre forêt de production et forêt de conservation d’une part et voir comment « piloter » et se servir de la nature pour extraire des produits ligneux de la forêt d’autre part. Cela constituerait un changement de paradigme qu’ils n’envisagent pas pour l’instant. Si certains propriétaires du groupe G2, voire G1, ont douté du modèle sylvicole landais après les tempêtes de 1999 et 2009 allant jusqu’à tester des itinéraires alternatifs, ils y ont finalement renoncé (Deuffic & Banos, 2019). Pour eux, la monoculture du Pin maritime avec des rotations à 35 ou 40 ans reste le mode de sylviculture le plus rentable. Seuls les propriétaires du groupe G3 laissent plus de place à l’expression de formes de naturalité via un mode de sylviculture irrégulière, continue et qui se veut proche de la nature. Pour reprendre la distinction de Larrère et Larrère (2015), leur idée n’est pas de « faire » mais de « faire avec » la nature, c'est-à-dire de développer une forme hybride de sylviculture où ils accompagnent l’expression de la naturalité plus qu’ils ne la restreignent (Larrère & Larrère, 2015).

Conclusion

Notre rapport aux expressions de la naturalité en forêt a toujours été pluriel, ambigu et probablement un peu excessif. Autrefois trop sauvages, les forêts devaient être policées ; aujourd’hui trop artificielles, il faudrait les ensauvager. Cette écologisation récente de nos regards constitue indéniablement un mouvement de fond, propre à nos sociétés urbaines qui aspirent à un retour de la nature en particulier en matière forestière. Pourtant ces attentes sont floues, voire équivoques. Tous les sondages d’opinion menés depuis les années 1970 font de la forêt un paradigme de nature mais sans décrire véritablement ce que ce terme recouvre pour les enquêtés. Des études portant sur des éléments de naturalité comme les bois morts montrent des tensions entre valeurs esthétique (le beau), écologique (le bon) et sécuritaire (le dangereux). On assiste néanmoins à un basculement des représentations. Pourchassés tout au long du XIXe et du XXe siècles par les gestionnaires forestiers, les bois morts trouvent désormais leur place dans nos forêts. Leur conservation est même institutionnalisée dans des directives et des indicateurs grâce à un long et méthodique travail de construction de la catégorie « bois mort » comme objet digne de l’attention des autorités publiques par un collectif de scientifiques, d’associations de protection de la nature et de forestiers (Deuffic & Candau, 2017). Ce travail de formation et d’information semble aujourd’hui porter ses fruits puisque usagers et forestiers acceptent la présence de bois morts en forêt et lui trouvent même un sens.

Quant aux espaces qui auraient pu être dédiés à la naturalité tels que les sites Natura 2000, ils se caractérisent par la même ambivalence. Ils apparaissent parfois comme une zone de relégation, une zone alibi qui permet de pousser l’artificialisation au maximum dans les zones dites productives, mais ce sont aussi des espaces de confrontation à la nature ré-ensauvagée et d’apprentissage à la naturalité pour les forestiers comme pour le public. L’expression de cette naturalité y est aussi fortement cadrée et dépend des décisions des gestionnaires et des limites qu’ils concèdent à la manifestation de ce laisser-faire. Dans ces espaces dédiés à la conservation de la nature, les forestiers internalisent ainsi d’eux-mêmes les nouvelles règles du jeu, officielles ou tacites. Ils cernent implicitement ce qui est raisonnable, tolérable, collectivement admis de faire sur la zone Natura 2000. En adoptant partiellement les codes sociaux des politiques de conservation, ils font preuve d’une perspicacité qui les protège d’éventuels conflits et leur évite d’être accusés de négligence environnementale. Cela ne témoigne donc pas d’une conversion brutale à l’écologie chez les propriétaires et gestionnaires forestiers mais de leur intérêt pour la conservation de la biodiversité du site, sans implication directe (ou très mesurée) et avec une gestion a minima voire passive. Cadrée, la naturalité y est aussi socialement construite, certaines formes s’avérant plus respectables et désirées (conservation et restauration d’espèces endémiques) que d’autres (apparition d’espèces invasives). Loin d’un blanc-seing, l’idée de « limiter l’action de l’homme et de faire plus confiance à la nature » reste donc, pour eux, conditionnelle et souvent dictée par des évaluations du type coûts-bénéfices. Mais alors que celles-ci étaient uniquement économiques dans les années 1950-1980, elles sont aussi environnementales aujourd’hui comme en témoigne l’écologisation partielle des pratiques sylvicoles dans les espaces de production.

Ces dispositifs qui valorisent la naturalité à travers des objets, des espaces et des systèmes de normes renversent aussi les effets de cadrage, c'est-à-dire le récit argumentatif qui prévaut à leur définition et leur légitimation. Le stigmate social autrefois vécu par les forestiers qui défendaient cette notion de naturalité est aujourd’hui transféré sur les propriétaires forestiers qui voudraient gérer ces zones comme des espaces de production classique. La mise en place de ces espaces de naturalité contribue aussi à modifier la hiérarchie des valeurs et des jugements sur les pratiques forestières dans les zones productives. Aujourd’hui, une partie de plus en plus importante des propriétaires et gestionnaires forestiers admettent que, dans certaines situations, la conservation de certaines essences et habitats puisse devenir prioritaire sur l’exploitation y compris dans des forêts de production. Ils défendent aussi l’idée qu’inversement, la gestion et l’exploitation des ressources ligneuses ne soient pas forcément incompatibles avec un niveau élevé de biodiversité, voire de naturalité et mettent davantage en œuvre des pratiques de gestion en ce sens. Les forêts françaises apparaissent donc comme le produit d’une coévolution homme/nature, des milieux « hybrides, coproduction de la nature et de la technique » où sont mobilisés des moyens techniques pour lancer, entraver ou infléchir des dynamiques naturelles (Larrère & Larrère, 2015, p. 212). Il serait alors possible de dégager une position médiane en abandonnant une vision où tout ce qui est naturel serait bon et tout ce qui est artificiel serait douteux au profit d’une approche qui évaluerait les activités humaines en fonction de leurs conséquences attendues pour la biodiversité (Larrère & Larrère, 2015). Cette position paraît d’autant plus pertinente qu’avec les changements climatiques, les propriétaires et gestionnaires forestiers s’interrogent sur les principes et stratégies à suivre. Or des options très différentes s’offrent à eux avec des degrés de naturalité très contrastés. Certaines visent à intensifier la gestion et accompagner très fortement l’adaptation des forêts (migration assistée, raccourcissement des cycles de production, introduction de nouvelles essences), alors que d’autres comptent sur la résilience des forêts pour s’adapter aux nouvelles conditions climatiques (sélection naturelle des espèces les plus adaptées, enrichissement ciblé et limité). La place et la confiance que les propriétaires et gestionnaires forestiers placeront dans les processus naturels pour faire face au défi climatique constitue, à nos yeux, une voie complémentaire de recherche sur ces questions de naturalité.

Notes

  • (1) Le groupe des neuf comprend : l’Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA), le Centre national des jeunes agriculteurs (CNJA), la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), la Fédération nationale des syndicats de propriétaires forestiers sylviculteurs (FNSPFS), la Fédération nationale des communes forestières (FNCoFor), l’Association nationale des centres régionaux de la propriété forestière (ANCRPF), l’Union nationale des fédérations départementales de chasse (UNFDC), la Fédération nationale de la propriété agricole (FNPA), l’Union nationale des fédérations départementales de pêche et de protection du milieu aquatique (UNFDPPMA).
  • (2) Cité par Larrère et Larrère (2015, p.13).

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Auteurs


Philippe Deuffic

philippe.deuffic@inrae.fr

Affiliation : INRAE, UR ETTIS, F-33612 Cestas

Pays : France

Biographie :

Adresse postale : INRAE, UR ETTIS - 50 avenue de Verdun - F-33612 Cestas Cedex


Elodie Brahic

Affiliation : INRAE, UR ETTIS, F-33612 Cestas

Pays : France

Biographie :

Adresse postale : INRAE, UR ETTIS - 50 avenue de Verdun - F-33612 Cestas Cedex


Eve Dusacre

Affiliation : INRAE, UR ETTIS, F-33612 Cestas

Pays : France

Biographie :

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